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jeudi 31 juillet 2014

FNDU: Mémorandum sur la gabégie du pouvoir de Ould Abdel Aziz

Le Général Mohamed Ould Abdel Aziz, on s’en souvient, avait justifié son coup d’Etat militaire en août 2008 par la prétendue impasse politique due, selon lui, au refus du gouvernement d'organiser une session parlementaire extraordinaire. Il s’est engagé, après sa prise du pouvoir à supprimer les causes de cette impasse par la réduction des pouvoirs du Président de la République, à renforcer le rôle du Parlement, à élargir le champ des libertés, à consacrer de saines pratiques politiques, à consolider l'unité nationale, à améliorer les conditions de vie des citoyens, et à lutter contre la pauvreté et la gabegie.
         Ce programme qui consistait, en fait, en une « appropriation » du discours de l’opposition traditionnelle, avait séduit, dans un premier temps, une partie de l’opinion, Ould Abdel Aziz se présentant comme un réformateur décidé à résoudre tous les problèmes de mauvaise gestion qui handicapaient l’essor de l’Etat mauritanien depuis l’indépendance. Cependant, il s’est rapidement avéré que ce n’était que propagande et mensonges, les pratiques du pouvoir venant, chaque jour, démentir les slogans réformateurs de l’homme et témoigner d’une mal gouvernance sans précédent.
Après six années de pouvoir, les mauritaniens ont découvert le vrai visage de Ould Abdel Aziz et la vraie nature de son régime dont trois caractéristiques essentielles résument aujourd’hui, de l’avis de tous les observateurs, l’essence autocratique et mafieuse :
Une absence totale de repères moraux : En témoigne la série de scandales, très médiatisés, dans lesquels le Chef de l’Etat s’est trouvé personnellement empêtré et qui sont tout à fait étrangers aux mœurs de notre société et aux valeurs culturelles et pratiques politiques de notre  peuple. Il s’agit, entre autres affaires troubles, de la balle du 13 octobre, des graves accusations de trafic de drogue et de blanchiment d’argent et des doutes sérieux qui planent sur l’origine de la fortune faramineuse du général lui-même et de certains de ses proches.  A ce sujet, la grâce accordée à un narcotrafiquant notoire, la libération des trafiquants  arrêtés à Lemzereb, les relations confirmées avec des personnalités impliquées dans le trafic de drogue, l’affaire des valises de fausse monnaie reconnue par le chef de l’Etat lui-même ne constituent que la partie immergée du gigantesque iceberg de la délinquance morale prêtée au régime d’Ould Abdel Aziz à qui les affaires douteuses ont, en quelque sorte, personnellement « collé à la peau » et auraient dû le disqualifier pour l’exercice de la magistrature suprême ;
Un autoritarisme sans limite et un profond mépris de loi : Cela se manifeste par la concentration des pouvoirs entre les mains du général, la transformation des institutions de la République en coquilles vides et le recours systématique aux mascarades électorales dont la dernière fut celle du 21 juin 2014, largement boycottée par le peuple mauritanien, à l’appel du FNDU ;
Une propension maladive à l’enrichissement illicite : Ould Abdel Aziz a mis le pays en coupe réglée, afin d’assouvir son appétit démesuré d’accumulation d’argent à son profit personnel à celui de son clan familial. Cette propension maladive à l’enrichissement illicite et le refus obstiné de publier sa déclaration de patrimoine, comme l’exige clairement la Loi, trahissent le caractère mensonger des slogans « Le Président des Pauvres » et « La lutte contre la gabegie », brandis par le régime cleptomane pour abuser de la crédulité des citoyens de bonne foi.
C’est, justement, pour édifier le peuple mauritanien et ses partenaires au développement que le FNDU se propose  d’établir, dans ce qui suit, un recueil d’une partie des manifestations de la gabegie ahurissante à laquelle s’adonne le pouvoir du général Ould Abdel Aziz,. Cet éclairage aidera à faire la lumière sur l’énorme préjudice  occasionné par la gestion de Ould Abdel Aziz à la collectivité nationale; préjudice et pertes qui se chiffrent en certaines de milliards d’ouguiyas !
Cet inventaire portera, dans un premier temps, sur des dossiers se rapportant aux  secteurs des Mines, de l’Energie et du Pétrole, de l’Equipement et des Transports, des Finances, de la Banque Centrale et du CSA. Nous aborderons, dans une seconde étape, d’autres secteurs de l’économie nationale.




Ampleur de la gabegie sous Ould Abdel Aziz
Ministère des Mines, du Pétrole et de l’Energie
La SNIM
La principale entreprise du pays, la Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM) qui exploite le minerai de fer est devenue, depuis l’avènement du pouvoir actuel, une boite noire pour toutes les manœuvres frauduleuses. Nous donnerons, ici, des indications révélatrices de l’ampleur du pillage opéré dans cette entreprise qui constitue le fer de lance de notre économie dont l’importance stratégique pour le pays a toujours dissuadé les pouvoirs successifs de la « domestiquer ».
Au lieu de mener une gestion prudente de cette entreprise - qui a bénéficié d’une conjoncture très favorable entre 2008 et 2013 à cause du prix élevé de la tonne de fer (passée de 80 à 140 US $) et de la préparer à la compétition soutenue que connait le secteur et aux retournements de conjonctures dans un environnement international incertain, le régime s’est livré à un pillage systématique de ses ressources à des fins  personnelles et particulières.
Ainsi, et bien que la convention avec les bailleurs de fonds qui ont financé un projet d’avenir pour le pays, le projet Guelb II, prévoit des conditions restrictives sur les engagements majeurs et sur la gestion de la SNIM elle-même, la direction actuelle de la société continue à dilapider les ressources de celle-ci sans rendre compte, ni aux créanciers, ni aux actionnaires de l’entreprise, autres que le Gouvernement mauritanien ! Osons l’énumération de quelques uns des dossiers de gabegie qui pullulent à la SNIM, en demandant au lecteur d’apprécier de lui-même l’ampleur du gâchis et en exigeant l’ouverture d’enquêtes indépendantes pour faire toute la lumière sur ces dossiers :
La SNIM a été mise au service des politiques populistes du pouvoir et détournée de sa propre mission pour servir les intérêts d’une poignée de proches du Président. A titre d’exemples, citons les opérations suivantes, où l’argent de la SNIM a été utilisé, en violation des procédures, pour financer des activités sans rapport avec la mission et les intérêts de la société :
L’achat d’avions au profit de la compagnie des transports aériens pour plus de cinquante millions de dollars avec un appui permanant à la trésorerie de Mauritania Airlines, sans aucun lien avec l’activité de l’entreprise ;
L’acquisition de bus d’occasion (!) pour la société de transport public à Nouakchott ;
L’achat d’importantes quantités de vivres, d’aliments de bétail et de camions de transport au profit du CSA ;
La construction d’usines de poteaux en béton (22 millions d’euros) et de tuyaux (en béton également) à Aleg ;
La construction d’infrastructures au profit de l’armée dans plusieurs localités du pays ;
La création de plusieurs sociétés en association avec les membres de famille du Président dont les participations symboliques leur permettent de profiter des ressources de la SNIM tout en leurrant l’opinion publique en lui faisant croire qu’il s’agit de sociétés publiques, alors que ce ne sont que des sociétés privées (Chami Steel, une société faite pour faire main-basse sur la ferraille de la SNIM, une Société d’Assurance, les usines d’Aleg, l’usine de nitrate avec des partenaires « marocains », etc.) ;
Le recrutement abusif des membres de famille du général président pour remplacer les techniciens de la société à des postes stratégiques (direction commerciale) ;
La mise en place d’une organisation caritative au service de la politique du pouvoir dont l’objectif est de réaliser des actions « humanitaires » en dehors de toute procédure ;
Le financement de sociétés privées défaillantes en dehors de toutes les règles de l’art (prêt de 15 milliards d’ouguiyas à la société en charge de la construction de l’aéroport de Nouakchott);
Le financement d’hôpitaux qui n’ont rien à voir avec l’activité de la société ;
Le financement de routes à Nouakchott et à Nouadhibou ;
Le financement de travaux au niveau de la Présidence et des ranchs privés du président ;
Le décaissement de dizaines de millions de dollars pour des forages miniers de complaisance confiés, en dehors de tout cadre règlementaire, aux proches du Président, le plus souvent sans réalisation effective ;
Les procédures de gestion de l’entreprise ont été bafouées et le pouvoir discrétionnaire a pris la place de la règle ;
Le projet Guelb II connait un retard considérable ayant occasionné un surcoût que certains experts estiment à plus de 30%, en raison des marchés de complaisance (tous les appels d’offre qui n’ont pas été gagnés par les sociétés appartenant à l’entourage du général président ont été déclarés infructueux puis relancés et attribués aux hommes de celui-ci avec des avenants !) et de la démotivation de l’encadrement qui est dégouté par la gestion de l’entreprise (voir la lettre ouverte des cadres de la SNIM).
La construction d’un building au centre ville de Nouakchott qui ne correspond à aucun besoin identifié par la Société suivant des critères objectifs de bonne gouvernance.
L’emprise de la famille présidentielle sur la SNIM est connue de tout le monde et les points évoqués ci-dessus ne représentent que la partie visible de la gabegie au niveau du fleuron de l’économie nationale.
       
Nous attirons l’attention de l’opinion publique sur le fait qu’un retournement de la conjoncture, de plus en plus probable avec la baisse de 30% déjà observée au niveau des prix du minerais par rapport à décembre 2013, pourra conduire, s’il n’est pas mis fin à de telles pratiques délictueuses, à la faillite de la SNIM, avec toutes les conséquences imaginables pour l’économie du pays, dont la société minière représente le premier contributeur.
Nous sommes en droit de douter de la pertinence de ces dépenses engagées par la SNIM et de ces « filiales » privées qu’elle a créées. Si le gouvernement est convaincu de leur utilité, c’est sur les ressources budgétaires de l’Etat qu’elles devaient être réalisées, surtout qu’on parle d’excédent record dépassant les cent milliards d’ouguiyas et de réserves en devises de l’ordre du milliard de dollars !
En réalité, la seule explication est l’absence de procédures au niveau de la SNIM et son opacité, ce qui permet de garder cette gabegie hors des regards indiscrets.
       
TAZIAZET et MCM
         Ces deux entreprises, qui contribuent pour environ 40% du chiffre d’affaires du secteur minier, auraient dû voir leurs conditions contractuelles révisées afin de permettre à la communauté nationale d’en tirer le plus grand profit comme c’est l’usage dans tous les pays miniers ; le potentiel du pays en ressources minières étant devenu certain. Au lieu de cela, des parents et hommes de confiance du général Ould Abdel Aziz ont été placés au sein de leurs hautes instances dirigeantes, afin d’assurer à l’entourage familial du régnant et ses partenaires en affaires un monopole quasi absolu sur toutes les prestations réalisées par des nationaux au profit de Taziazet et MCM et de canaliser vers le même milieu tous les avantages qui peuvent être tirés de leurs activités. A cet effet, nombre de sociétés détenues par l’entourage présidentiel ont été créées.
En raison de la cupidité de cette camarilla, l’administration a perdu toute emprise sur ces entreprises qui continuent de licencier nos compatriotes, alors qu’elles recrutent des étrangers et de dégrader notre environnement sans aucune réaction des autorités.
Des informations concordantes font état d’un découragement des deux entreprises et d’une  constante révision à la baisse de leurs investissements, en raison des arnaques dont elles font l’objet de la part de personnalités influentes du régime.




Les permis miniers
         L’octroi des permis miniers a connu une augmentation exponentielle durant les six dernières années. Ainsi, depuis que la vocation minière du pays a été confirmée avec le début de l’exploitation de la mine d’or de Taziazet, le pouvoir a attribué un nombre impressionnant de permis (voir les communiqués du conseil des ministres) et particulièrement aux membres de l’entourage familial du chef de l’Etat. Des permis ont été retirés d’investisseurs étrangers pour les attribuer à certains proches du général, seuls ou en association avec des partenaires étrangers (Tamaghout, le quartz, le phosphate, etc.). Cette gabegie a retardé beaucoup d’entreprises qui auraient dû, dans une situation normale, avoir déjà commencé l’exploitation de leur permis. Elle a conduit d’autres à différer leurs explorations à cause de l’environnement exécrable des affaires.
L’exploration pétrolière
         Depuis son accession au pouvoir, Ould Abdel Aziz a consacré la mainmise d’une compagnie pétrolière (Tullow) dirigée par un de ses hommes de main, alors qu’elle ne détenait qu’un infime pourcentage du puits de Chinguetti. C’est elle qui est désormais le leader de l’exploration, de la production et de la commercialisation du pétrole brut en off shore. C’est aussi elle qui a le monopole des champs gaziers et de leur exploitation avec des contrats d’achat de son produit par les centrales électriques de la Société de Production de l’Electricité à partir du Gaz (SPEG) à un prix fortement majoré, réduisant considérablement l’intérêt que devrait constituer la production de l’électricité à partir du gaz naturel pour notre économie !
Face au refus de lui renouveler ses permis et aux multiples problèmes qui lui auraient été créés, l’opérateur du projet Chinguetti (Pétronas) - qui était le chef de fil dans le secteur - a été obligé de céder sa place à la société de l’entourage du Président. Pétronas serait en instance de quitter le pays.
Les marchés de la SOMELEC
         La SOMELEC n’a pas échappé, elle aussi, à la main mise de l’entourage du Président, qui en est le fournisseur  principal. Tout le monde se souvient encore de la polémique autour de la centrale de 120 MW qui a été confiée au fournisseur le plus cher au grand dam du moins disant qui était représenté par une entreprise de la place bien connue. On se rappelle également la polémique autour des 60 MW que devait financer la Banque Islamique de Développement et qui devaient être confiés, par marché de gré à gré, à une entreprise de l’entourage présidentiel. Ce n’est un secret pour personne que ce même membre de la famille du Président est le représentant d’un grand fournisseur de matériel solaire ; ce qui explique que, depuis quelque temps, les grandes artères de Nouakchott et d’autres villes du pays ont été envahies par ses poteaux et que la part du solaire dans notre production électrique progresse à grande vitesse.  Une très bonne chose pour le pays n’eut été la surfacturation et le népotisme qui en sous-tendent l’octroi des marchés.
Les hydrocarbures liquides raffinés
         Dès son installation au pouvoir, l’actuel Chef de l’Etat a crée sa propre société de commercialisation des hydrocarbures (National Petroleum, NP, que certains appellent Notre Président) au mépris des textes légaux et réglementaires. En effet, les textes exigent des compétences techniques et des ressources financières que la nouvelle société n’avait pas, venant d’être créée de toutes pièces. Depuis lors, cette NP a eu tous les monopoles du marché public et est partenaire local, comme par hasard, de tous les fournisseurs du marché mauritanien en hydrocarbures raffinés !

Ministère de l’Equipement et des Transports
L’aéroport de Nouakchott
         La plupart des experts en la matière s’accordent à dire qu’à ce stade du volume de trafic aérien en Mauritanie, la construction d’un nouvel aéroport ne se justifie pas. La piste d’atterrissage et les installations techniques de l’actuel aéroport répondent aux critères techniques requis.  Le seul besoin essentiel pour permettre à l’aéroport actuel de satisfaire à tous les critères techniques est l’extension de l’actuelle aérogare ou la construction d’une deuxième.
         Indépendamment de l’impertinence de ce projet, c’est la nature même de la transaction qui montre l’essence mercantiliste et les méthodes mafieuses du régime qui ne recule devant rien pour transgresser toutes les règles, pourvu que cela procure à son chef et à son entourage des avantages matériels. L’accord prévoit la construction d’un aéroport d’une capacité de deux millions de passagers (le marché actuel n’atteint pas les deux cent mille passagers et les plus grands aéroports de la sous région, Dakar et Abidjan, n’atteignent pas le million de passagers) avec deux pistes (60% du coût pour les pistes et 40% pour le bâtiment) en contrepartie de quatre millions cinq cent dix mille (4.510.000) m2 dans les quartiers de Tevragh Zeina et du Ksar pour un délai d’exécution de 24 mois.   Il n’y a eu aucune étude pour estimer, ni les coûts de la construction de l’aéroport, ni la valeur des terrains inclus dans ce troc d’un autre âge ! Une  mission du FMI avait, en 2012, estimé la transaction à 200 à 300 millions de dollars US, soit à peu près 80 milliards d’ouguiyas. Il s’agit donc d’un gré à gré de 160 milliards - soit plus de deux fois l’investissement public financé sur ressources propres de Etat cette année là - hors budget et sans en référer au Parlement. Plus grave encore, l’entreprise à laquelle le marché a été attribué n’a à son actif aucun km de piste ; elle venait d’être créée pour l’occasion !
L’aéroport devait être réceptionné en octobre 2013, mais à quelques mois de la réception prévue, les autorités se rendent compte que l’entreprise n’a ni les ressources financières ni les compétences techniques pour réaliser l’aéroport dans les délais. Au lieu de prendre les mesures de sanctions et de pénalités définies par le code des marchés publics, le pouvoir a donné instruction à la SNIM et à la CDD de « prêter » cinquante millions de dollars chacune au maître d’œuvre en défaillance par rapport à ses engagements contractuels ! Une prime au manquement aux engagements contractuels. Du jamais vu ! La SNIM a effectivement transféré les cinquante millions demandés à l’entreprise en difficulté. Le tollé qu’a soulevé ce « prêt » de la SNIM a dissuadé la CDD d’en faire de même. Au moins officiellement, car certains estiment qu’elle a dû passer par des voies moins accessibles au public. D’aucuns expliquent cette générosité de l’Etat vis-à-vis de l’entreprise de l’un des hommes d’affaires du général président, par le fait qu’une grande partie des superficies octroyées à l’entreprise a été, en réalité, rétrocédée au chef de l’état lui-même.  D’après nos informations le niveau d’exécution des travaux dans cet aéroport n’excède pas les 50% et ce malgré un an de retard !
Le secteur routier
         Le secteur routier constitue l’une des priorités de la politique des gouvernements successifs depuis de nombreuses années. Un programme important, initié depuis 2006, et qui approche les 2000 km, est en cours. Son coût global est proche de 2.000 milliards d’ouguiyas, déjà décaissés à 80%, pour un niveau de réalisation qui n’atteint pas les 50%. Tous les chantiers connaissent des retards considérables, pouvant parfois dépasser le double de la période prévue pour leur réalisation. Les exemples précis ne manquent pas : Kiffa-Tintane, Kiffa- Kankossa, Nouakchott-Nouadhibou, Atar-Tidjikja, Aweyvia-Keur Macen, Tiguend-Méderdra, etc.
Ces retards constituent des gaspillages considérables en raison des surcoûts qu’ils occasionnent. Les experts estiment qu’un retard de 12 mois, pour un projet dont la réalisation était prévue en 24, occasionne un surcoût de plus de 20% du budget initial. Le « génie » du général président a consisté à mettre en place un système qui lui permet de s’arroger le monopole de ce secteur à travers des institutions publiques qui deviennent des prête-noms pour lui et pour ses proches. Ces institutions s’appellent ENER, ATTM, SNAT et le Génie Militaire. Elles bénéficient à elles seules de plus 80% des marchés du secteur routier, mais aussi du secteur hydraulique, un autre secteur d’absorbsion prioritaire des investissements publics. L’ATTM est particulièrement engagée dans ce processus de gabegie. Le système fonctionne à travers l’attribution des marchés aux institutions  « publiques » précitées, lesquelles les sous-traitent intégralement aux proches du président ou les réalisent en faisant appel à la location du matériel des sociétés de celui-ci et de ses proches (ce n’est un secret pour personne que le Président est le premier propriétaire d’engins de travaux publics et de forages hydrauliques et miniers dans le pays).  La sous-traitance se fait à des prix parfois supérieurs aux prix du marché initial tout en permettant au sous-traitant, après avoir été payé plus de 50% des travaux sans avoir réalisé grand-chose, de se retirer avec un arrangement qui lui permet de ne pas rembourser les décaissements déjà reçus, en laissant à l’entreprise « publique » son projet sur les bras, occasionnant ainsi des retards considérables et des pertes que la SNIM ou le Trésor public devront prendre en charge. Tout le monde sait que l’ensemble des routes réalisées par ATTM à Nouakchott en 2010-2012 sont actuellement en reprise totale par l’ENER ! L’on peut donc imaginer l’ampleur de la gabegie dans ce secteur, combien elle coûte au pays et rapporte au Président et à son entourage.
Mauritanian Development Corporation (montage des avions)
         La Mauritanian Development Corporation (MDC), société écran qui n’a d’existence que le nom, a bénéficié d’un marché de plus de 7 milliards d’ouguiyas (23. 650. 000 USD) sans qu’aucune procédure de dépense de l’argent public n’ait été  respectée (pas d’appel d’offre) pour monter une usine d’assemblage d’avions à Nouakchott. Une avance de plus de deux milliards d’ouguiyas (7.095.000 USD) a été versée à cette société fictive avec une attribution d’un terrain de quelques hectares à proximité du fameux nouvel aéroport de Nouakchott. Le détournement de deniers publics que constitue cette affaire est doublé d’une opération de surfacturation manifeste. Jusqu’aujourd’hui, cinq mois avant la date de réception prévue de ces avions, aucune trace de cette société n’est visible à Nouakchott, encore moins de la fameuse usine de montage des avions !
La Société des Transports de Nouakchott
         La mauvaise expérience de la STPN n’a pas empêché Ould Abdel Aziz de créer, sans étude préalable, une société de transport public à Nouakchott. Des bus d’occasion (!) dont la durée de vie n’a pas atteint deux ans ont été acquis, à cet effet, auprès de l’Etat d’Iran dans des conditions d’opacité totale. D’autres bus, toujours d’occasion pour ceux d’entre eux qui circulent déjà, ont été acquis récemment sur financement de la SNIM. On ne sait pas encore combien de temps ils vont fonctionner. Nous ne disposons pas d’informations précises sur ces transactions pour le moins opaques, sinon que de fortes présomptions de malversations pèsent sur elles.


Le Programme de ISKAN (Chami et N’Beiket Lahouach)
         Au moment où des secteurs vitaux comme la santé et l’éducation font face à des difficultés considérables faute de moyens financiers, des dizaines de milliards d’ouguiyas ont été gaspillés pour construire et équiper des villes fantômes auxquelles on a donné les noms de Chami et de M’Beiket Lahouach. Tout au long des trois dernières années, ces deux villes  fantômes ont englouti près de 30 milliards d’ouguiyas ! L’examen des derniers appels d’offre lancés par la SOMELEC montre que l’électrification de la seule ville de Chami coûte plus de trois milliards d’ouguiyas au contribuable mauritanien.
Ministère des Finances
La douane et les impôts
         Depuis qu’il s’est emparé du pouvoir en 2008, le général Ould Abdel Aziz a mis les services de la douane et des impôts au service de son entourage en créant un monopole de fait au profit des sociétés de ses proches par le biais d’une fiscalité douanière préférentielle rendant impossible toute concurrence. Des centaines de milliards d’ouguiyas liés à des entrepôts fictifs n’ont jamais fait l’objet de régularisation, occasionnant des manque à gagner considérables pour le trésor public. Au niveau des impôts, les redressements fiscaux ciblés ont caractérisé cette période.
La distribution des terrains à Nouakchott et à Nouadhibou
         Si la volonté de Ould Abdel Aziz et de son clan réduit de piller le pays et de mettre la main sur ses richesses se manifeste au niveau de tous les secteurs économiques, elle atteint des proportions  inqualifiables dans le domaine foncier. Ici, le ravage a lieu au grand jour et sans vergogne. Qu’on en juge :
Distribution, sur la route de Nouadhibou, de terrains de plusieurs dizaines de milliers de m2 (on a pu constater des concessions d’un millions de m2 !) à des particuliers sous l’appellation de « concessions rurales » ou soit disant pour la construction de projets immobiliers. En réalité, ces terrains ne sont destinés qu’à la spéculation immobilière et à l’enrichissement rapide de la coterie de Ould Abdel Aziz ;
Distribution de toute la zone comprise entre la plage des Pêcheurs et le Port de Nouakchott, amputant parfois sur le domaine portuaire inaliénable, au profit de l’entourage du Président ;
Distribution des meilleurs terrains sur l’Avenue AL MOUQAWAMA à la parentèle proche du général régnant, soit disant pour construire une « zone industrielle ». Ces terrains sont en fait destinés à la construction de ranchs particuliers et de résidences secondaires ;
Distribution des meilleurs terrains de l’Avenue SOUKOUK aux mêmes personnes ;
Cession des terrains dits des « Blocs » au général Ould Adebl Aziz en personne et à ses proches avec obligation de mise en valeur en 24 mois, alors que depuis 5 ans rien n’a été encore réalisé et aucune sanction n’a été prise à l’encontre des bénéficiaires ;
Morcellement d’une partie des terrains abritant le Stade Olympique et l’Ecole de Police et cession des superficies prélevées à de proches parents du général pour construire des boutiques ou des centres commerciaux. Crime innommable que cette amputation d’édifices publics vitaux, pour en faire des boutiques privées ! Plus scandaleux encore, il semble que les attributaires ne sont en fait que des prête-noms ; les vrais propriétaires étant Ould Abdel Aziz lui-même et son clan familial.
Vente de plusieurs autres équipements collectifs aux proches du Président (siège des fanfares à l’ilot G, hôtel Marhaba, etc.).
Les 50 millions USD de l’Arabie Saoudite
         A la demande des autorités de l’époque, l’Arabie Saoudite avait accordé à notre pays un don de 50 millions de dollars USD pour renforcer les moyens de l’armée nationale suite aux attaques terroristes en 2007 et 2008. Le pouvoir issu du coup d’Etat de 2008 avait trouvé le montant dans son intégralité dans les comptes du Trésor public et avait immédiatement procédé à son utilisation sans se soucier des procédures, ni des règles en la matière. L’opposition continue depuis 2009 à réclamer toute la lumière sur le sort réservé à ce pactole dont l’utilisation n’a laissé aucune trace visible. Le Parlement, seule autorité habilitée à autoriser les dépenses publiques, n’a jamais été saisi au sujet de ce don !
Les 200 millions USD de la transaction SENOUSSI
         Dans une opération que seul un Etat voyou peut entreprendre, le pouvoir en place aurait, moyennant une forte rétribution, assuré à l’ancien directeur général de la sûreté de Kadhafi que sa famille et lui pourraient venir s’installer en toute sécurité en Mauritanie, avant de le livrer aux nouvelles autorités de Libye contre une rançon de 200 millions de dollars US ! Le Gouvernement libyen, qui a refusé de verser cet argent sur des comptes personnels, a effectué un transfert à la Banque Centrale de Mauritanie. Dans un pays comme le nôtre, connu pour son hospitalité et son respect des valeurs islamiques, toute la lumière doit être faite sur une telle opération et les différents acteurs qui y ont pris part doivent répondre de leurs actes devant les tribunaux de la république.

La BCM et le système bancaire
Les nouveaux agréments bancaires
         Les cinq dernières années ont connu la création d’une dizaine d’institutions financières, soit pratiquement le double de ce qui existait en 2008, dont six banques et quatre sociétés de crédit leasing. Ces institutions ont été créées au mépris des textes en vigueur. Au lieu d’étudier les besoins du marché et de prendre en compte les critères de l’expertise et de la disponibilité des ressources financières, les agréments ont été distribués à des individus, tous en association avec l’entourage présidentiel, sans compétences ni ressources, dans le seul but de les enrichir rapidement en leur donnant le pouvoir de création de la monnaie. La Banque Centrale a dû déroger à toutes les règles pour permettre la création de ces institutions financières. Elle a carrément ignoré les exigences des fonds propres (six milliards d’ouguiyas) et a, quelquefois, donné elle-même à de nouvelles banques les ressources nécessaires pour avoir les fonds propres requis. Les heureux bénéficiaires se sont retrouvés du jour au lendemain sur la liste  des milliardaires du pays.


L’allocation des devises
Malgré des réserves en devises dépassant le milliard de dollars, la Banque Centrale de Mauritanie n’accorde les devises qu’à un groupe de privilégiés appartenant à l’entourage immédiat du Président. Elle a instauré, avec la douane, un monopole de fait au profit d’un petit groupe de gens, en lui accordant des devises à des prix préférentiels et une fiscalité douanière préférentielle, sans aucun souci des conséquences pour les autres acteurs économiques et pour les consommateurs ainsi soumis à un marché monopolistique.
La manipulation du taux de change
         Des informations de plus en plus persistantes font état d’une manipulation fréquente des taux de change pour favoriser davantage le groupe réduit des bénéficiaires des devises de la Banque Centrale. Cette manipulation se fait de façon ponctuelle au moment des transferts de certains importateurs privilégiés. Plus que tous les crimes économiques commis par le pouvoir actuel, une telle pratique dépasse tous les entendements possibles et imaginables.  Certains estiment que la Banque Centrale est redevenue, elle aussi, une boite noire avec des pratiques beaucoup plus mafieuses et plus dangereuses pour notre économie que toutes les pratiques des temps les plus sombres.
Le Commissariat à la Sécurité Alimentaire
         Le Commissariat à la Sécurité Alimentaire est accaparé par les trois principaux hommes d’affaires les plus introduits auprès du Président. Ceux-ci bénéficient de l’exclusivité des ventes par le CSA de l’aide alimentaire (italienne, japonaise, etc.). C’est aussi auprès d’eux, presqu’exclusivement, que le CSA achète les produits destinés aux boutiques EMEL, dont la raison d’être semble-t-il, n’est autre que d’engraisser davantage les commerçants proches du pouvoir.
         Les différents dossiers évoqués dans ce mémorandum, ne représentent qu’une infime partie de la gabegie institutionnalisée par l’actuel pouvoir ; celle strictement limitée à l’entourage immédiat du Président. Nous ne pouvons pas être exhaustifs, tant la gabegie touche à tous les secteurs de l’économie. Nous n’avons pas parlé du secteur agricole et de ses marchés d’engrais, de grillage de protection, ni du crédit agricole, ni des équipements achetés par la SNAT pour une dizaine de milliards d’ouguiyas et dont une grande partie n’a, semble-t-il, jamais été livrée (voir le problème actuel de la moisson de la contre saison). Nous n’avons pas évoqué la santé et les scanners de seconde main qui n’ont fonctionné que quelques semaines, malgré le tapage médiatique que l’on sait, pas plus que la pêche, la défense, etc.
         Nous envisageons, dans une étape ultérieure, de passer en revue l’ensemble des secteurs de l’économie pour mieux informer le peuple mauritanien sur le pillage méthodique par le pouvoir en place des ressources du pays, en essayant si possible de donner des estimations des pertes occasionnées par cette gestion chaotique sous forme de détournement et de gaspillage. Notre objectif pour le moment est d’attirer l’attention des mauritaniens sur la gravité de la situation et sur la vraie nature de la personne qui gouverne notre pays depuis six ans à son propre profit et s’obstine à continuer à le faire malgré la volonté de notre peuple. Nous lançons, ici, un appel à tous les patriotes pour ouvrir les yeux et regarder la situation du pays en face. Aux soutiens du régime, nous rappelons que quand il s’agit, comme c’est le cas aujourd’hui,  des intérêts supérieurs du pays, il est puéril de courir derrière de miettes ou se gargariser du confort d’être du côté  du « camp fort ». Il ne s’agit plus, désormais, d’une question de démocratie ou de pouvoir, ni de majorité ou d’opposition ; il s’agit de la survie de notre pays. Les pratiques instaurées par le pouvoir en place ne peuvent conduire qu’à l’explosion sociale et à l’effondrement de l’Etat. Il est de notre devoir de dépasser tous nos clivages et de dire ensemble que cela ne peut pas continuer. Il est de notre devoir de travailler ensemble pour jeter les bases d’une société démocratique basée sur la liberté, le respect de la chose publique, la justice sociale et la saine compétition dans un Etat de droit.
         Ce mémorandum s’adresse aussi à nos partenaires étrangers, avec lesquels nous avons des intérêts communs et qui sont concernés par notre sécurité et notre stabilité, pour qu’ils prennent conscience de la nature du pouvoir qui nous gouverne et des conséquences prévisibles de ce mode de gouvernement. Ils sont appelés à découvrir le vrai visage de l’homme qui tient la Mauritanie, de prendre conscience, eux aussi, des graves menaces que sa présence au pouvoir fait peser sur notre peuple et sur les relations bilatérales. Ould Abdel Aziz n’est pas un partenaire fiable, cela crève les yeux. Les partenaires au développement de notre pays doivent enfin le voir !

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