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vendredi 25 juillet 2014

Les subsahariens se sentent discriminés au sujet de la carte de séjour

Les ressortissants subsahariens vivant en Mauritanie se sentent discriminés au sujet de la carte de séjour, selon plusieurs témoignages que Alakhbar a recueillis auprès d’eux.

Les autorités de Nouakchott ont réaffirmé, à plusieurs occasions, que la carte de séjour concerne « tous les étrangers vivant en Mauritanie ». Toutefois beaucoup de subsahariens estiment être la seule cible des récentes arrestations, détentions et reconduites à la frontière faute de carte de séjour.

L’Authentique quotidien, dans son numéro 1776, jeudi 7 mars 2013 a écrit : « Face à la recrudescence des rafles et des reconduites systématiques aux frontières (….) c’est surtout le sentiment de vivre une véritable ségrégation qui ronge les immigrés africains, qui remarquent que les étrangers arabes sont épargnés et qu’ils sont les seuls à être traqués ».

Le 11 février 2013 vers 18 heures, la Police a arrêté, prés de la Polyclinique (Nouakchott), un jeune subsaharien qui était en possession de son récépissé pour la carte de séjour. Le 12 février, un Sénégalais, qui venait d’effectuer deux jours en Mauritanie, a été arrêté, détenu au commissariat Tevragh Zeina I puis reconduit à la frontière.

Lundi 25 février, 30 étrangers venant de différents pays subsahariens ont été reconduits à la frontière avec le Sénégal à bord d’un bus, selon le correspondant de Alakhbar à Rosso. Le 27 février, une source sécuritaire à informé à Alakhbar de l’arrestation et détention de cinq maliens au commissariat d’El mina III et de 10 étrangers subsahariens au commissariat de Tevrag Zeina II.

Dans la nuit de samedi 9 à dimanche 10 mars, la Police a intercepté un couple ivoirien, avec ses trois enfants, à la sortie d’un restaurant de la place et les a conduits au commissariat de Tevragh Zeina I.Tous ceux-ci sont reprochés soit de ne pas avoir une carte de séjour soit de ne pas aller payer pour la récupérer

Un diplomate subsaharien a souligné à Alakhbar que les dernières reconduites à la frontière c’étaient vers la frontière sud-ouest ont été faites « sans assistance consulaire » ce qui a empêché de connaitre le nombre de concernés par leur autorités diplomatiques.

Les autorités mauritaniennes n’ont d’ailleurs adressé qu’une seule note verbale aux représentations diplomatiques sur la question de la carte de séjour. C’était le 13 mai 2012 sur demande des ambassadeurs de la Gambie, du Mali et du Sénégal, « pays privilégiés », selon ladite note laquelle informait l’allégement des formalités d’obtention de la carte de séjour.

Il y a par la suite la réaction du ministre mauritanien de l’Intérieur en faveur des ivoiriens. En avril 2011, Mohamed Ould Boilil a rappelé au directeur général de Sûreté de Nouakchott que les Mauritaniens circulent librement en Côte d’ivoire avec leur carte consulaire. Le ministre a été auparavant saisi, à travers celui des Affaires étrangères, par le consul honoraire de la Côte d’Ivoire. Tidiane Diagana, a rappelé que la Mauritanie est sortie de la CEDEAO depuis 2000, mais ses ressortissants bénéficient toujours de la liberté de circulation des personnes et des biens.

Le consul a montré lors d’une rencontre, vendredi 15 mars 2013, avec les ressortissants ivoiriens en Mauritanie, une carte de séjour d’un Mauritanien établi en Côte d’ Ivoire. Une carte obtenue après que l’interessé a présentaté une carte consulaire et un timbre de 500 francs CFA (300 Ouguiyas).

Hormis ces exceptions, les autorités mauritaniennes ont court-circuité les représentations diplomatiques en touchant directement les représentants des associations des communautés étrangères sur la question de la carte de séjour. Plus de cinq rencontres ont réuni ces derniers avec des autorités mauritaniennes à la Wilaya de Nouakchott. Mais "seuls des ressortissants subsahariens ont été convoqués", protestent ces derniers.

Les première rencontre a été tenue, jeudi 24 mai 2012, pour annoncer l’allégement des formalités d’obtention de la carte de séjour. Seuls des ressortissants subsahariens ont été présents.

La deuxième réunion a eu lieu le mercredi 4 juin 2012. Le Wali a déclaré au cours de cette rencontre : « On est loin des 150 personnes enrôlées chaque jour au début de l’opération (...) Il faut donc plus de sensibilisation de vos compatriotes ». Le wali s’adressait aux seuls ressortissants subsahariens présents.

La troisième rencontre, mardi 3 juillet 2012, a été reportée par le wali-adjoint, Mohamed Ould Teyib après que les subsahariens ont demandé : « Pourquoi sommes-nous les seuls à être toujours convoqués ? ». Ould Teyib a aussitôt pris son téléphobe et demandé à la Police de faire assister les absents à la prochaine rencontre.

A ladite prochaine rencontre, organisée dimanche 9 septembre 2012, seuls deux ressortissants de pays arabes dont un Syrien sont venus. Les autres étrangères présents ont été tous des subsahariens. Etaient présents aussi, le directeur régional de la Sûreté, le directeur général adjoint de L’Agence Nationale du Registre des Populations et des Titres Sécurisés (ANRPTS) et le ministre mauritanien de l’intérieur, Mohamed Ould Boilil, lequel a annoncé durant la réunion la gratuité de l’obtention de la carte de séjour. Le wali a, à son tour, expliqué que "la contrainte financière, c’est-à-dire les 30 000 Ouguiyas de quittance, a été levée(…) ». Et « désormais, la carte est délivrée 72 heures après le dépôt », a ajouté le directeur général adjoint de l’ANRPTS. Ce délai de 72 h de n’a jamais été respecté.

Le journal Horizon (officiel) qui est revenu sur la rencontre a écrit dans son numéro 5833 du 10 septembre 2012 : « Les étrangers résidant en Mauritanie sont exemptés, pendant un mois, de la taxe de séjour, a annoncé le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation. » (voir Ami et Cha’ab, cependant le numéro 5833 semble être supprimé des archives de ami.mr) La nouvelle va faire le tour des foyers des étrangers lesquels ont rué vers les trois centres d’enrôlement. Depuis, Il y a eu, devant ces centres des files indiennes, des bousculades, des bagarres de positionnement dans les rangs, des rackettes menées par des agents chargés de l’opération et par des forces chargées de la sécurité, des cas d’évanouissements (deux femmes le 11 septembre 2012) et à un mort, le 16 octobre 2012.

Dimanche 29 janvier 2013, le wali de Nouakchott a convoqué à une nouvelle rencontre à laquelle seules les communautés étrangères subsahariennes ont été présentes. Et le wali a annoncé : « Les cartes de séjour sont disponibles et qu’elles peuvent être retirées à partir du 3 février, mais contre payement de la somme de 30 000 UM (…) », lit-on dans La Nouvelle Expression (N° 171, 3 février 2013). Et à la question d’un participant : « Pour quoi vous nous aviez-vous dit que tout était gratuit », le wali a répondu : « C’était une erreur de communication ».

Cette erreur de communication n’a pas épargné les deux présidents sénégalais et mauritanien. Macky Sall, en visite, dimanche 16 septembre 2012 en Mauritanie, a remercié son homologue Mohamed Ould Abdel Aziz pour la gratuité de la carte de séjour. Etonné, Ould Abdel Aziz lui a répondu qu’elle n’a jamais été gratuite. Le président mauritanien s’est ensuite tourné vers son ministre de l’Intérieur qui était à ses côtés lui demandant des explications. Et Ould Boilil a répondu que c’est le dépôt qui est gratuit et non le retrait.

« Par ce leurre, les autorités mauritaniennes ont poussé beaucoup d’étrangers à aller s’entasser devant les centres d’enrôlement. Mais qu’est ce qu’elles vont encore inventer pour que les gens payent 30 000 UM pour retirer leur carte ? », s’énerve un étranger.

Dans le même contexte, L’authentique quotidien a écrit dans son N° 1776, jeudi 7 mars, que les étranges « se disent floués par l’annonce préalable du gouvernement mauritanien qui avait levé la taxe de 30.000 UM pour la carte de séjour ».

L’on souvient qu’avant l’annonce de la gratuité de l’obtention de la carte un nombre d’étrangers, notamment des chefs de famille, avaient commencé à quitter le pays jugeant « trop chère la quittance de 30 000 UM ».

Par ailleurs Alakhbar a appris de source informée que le Mali a décidé d’appliquer la réciprocité en imposant une carte de séjour à 75 000 CFA (45 000 ouguiyas) aux ressortissants mauritaniens sur son territoire

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