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mercredi 13 avril 2016

Traversée de la Gambie : Jeu et enjeu de pouvoir pour Yaya Jammeh

Paraphrasant Daniel Penac, dirait-on, pour faire l’histoire, il faut refaire la géographie. C’est la géographie qui nous condamne à vivre tel climat, tel relief ou … à avoir tel voisinage. Les grands hommes qui entrent dans l’histoire sont ceux qui parviennent à refaire leur géographie : par exemple en déviant des cours d’eau pour créer des fleuves ou des lacs artificiels pour vaincre la sècheresse et la faim, en faisant disparaître des montagnes pour l’habitat ou l’agriculture de leur peuple ou en agrandissant les frontières de leur pays, etc. Sous ce rapport, ceux qui entrent dans l’histoire – disons les grands hommes alors ! - sont ceux-là qui parviennent à transformer un environnement naguère hostile en un milieu familier pour le plein épanouissement de leur peuple. Et s’il est vrai qu’on subit sa géographie, on peut tout de même refaire son histoire. En ce moment, ce que la géographie a de plus hostile pour les sénégalais, c’est le voisinage gambien qui tourmente les sénégalais. Avec ce blocus, le président Macky Sall a l’occasion prodigieuse d’entrer dans l’histoire en réglant définitivement la fastidieuse question de notre voisinage avec cet Etat. Une aubaine ; depuis le 18 février 2016, la frontière entre le Sénégal et la Gambie est fermée. Du côté sénégalais, le syndicat des transporteurs qui a pris l’initiative, proteste contre le renchérissement unilatéral du côté gambien des taxes en ce qui concerne le passage des gros porteurs sénégalais. En réaction, tous les véhicules qui doivent se rendre en Casamance ou aux encablures, doivent passer inéluctablement par le chemin que les chauffeurs nomment affectueusement « corniche ». En plus de cette décision, une sorte de blocus est initiée autour de la Gambie empêchant tout mouvement de véhicules d’un sens ou d’un autre. Telle une réponse du berger à la bergère, cette claustration de la Gambie a porté ses fruits : le pays de Diamé est asphyxié et, du coup, les pénuries commencent à faire légion. Quasiment étouffé, le président gambien a fini par saisir la CEDEAO pour se plaindre contre ce qu’il appelle une violation flagrante du principe sacrosaint de la libre circulation des personnes et des biens. Avec une mémoire aussi sélective que la sienne, et comme par enchantement, il oublie que c’est ce même principe que son pays foule au pied tous les jours, faisant subir à ses voisins (et parents ?!) sénégalais qui traversent le pays, les traitements les plus dégradants. 

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