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mardi 22 mars 2016

Pouvoir et opposition en Guinée, de nouveau le couteau à la gorge


Ce qui manque dans ce pays de cocagne par excellence et d’antagonisme comme sport national, c’est la pédagogie et la psychologie de la convenance sociale. Tous ces grands mots se résument en une seule expression : la concorde sociale, sans laquelle le bout du tunnel s’éloigne.
 

Le Pouvoir d'Alpha Condé vient de l’apprendre, à ses dépens. Toutes les performances économiques atteintes et qui faisaient sa fierté sont allées à vau-l’eau par ce manque de considération et la minimisation de l’autre. Le pot cassé de la désinvolture et de l’arrogance pour un laps de temps sera difficile et long à ramasser, en plus d’être un fardeau de dette pour les générations prochaines, qui peuvent ne voir aucun plan quinquennal réalisé par ce retour à la case départ, parce que c’en est bien un. Un ou deux autres passages devant le FMI semblables à celui de la mi mars 2016, avec des demandes et supplications de dérogations dans tous les domaines, la Guinée risquerait d’être recalée et la redescente dans les PPTE serait très désagréable pour l’honneur et l’orgueil de déchanter après avoir chanté d’atteindre le point d’achèvement. Est-ce une fatalité propre à la Guinée, puisque revoilà Ebola, opportunité ou malédiction ?
Les raisons de ce va-et-vient, de ce piétinement, de ce vol stationnaire guinéen ne sont pas connues  depuis l’indépendance, mais pendant la résistance à la pénétration coloniale, sinon bien avant encore, mais les Guinéens n’ont jamais tiré la leçon que voici : les quatre régions naturelles ont rivalisé d’ardeur à opposer une résistance à la colonisation. Pendant le référendum, la majorité réelle avait voté NON, ce qui devrait être perçu comme un avertissement pour les politiques qui voulaient confisquer le pouvoir. Hélas !  
L’indépendance mal partagée était une domination endogène : « Tout sauf ça ! ». La Guinée était tombée dans une profonde ornière pour 26 longues années. Une génération fut ainsi sacrifiée A chaque changement de régime, les jobards se croyaient sortis de cette ornière, que nein ! Ils ont fait comme Vincent, celui qui mit l’âne dans un pré puis dans l’autre pour croire qu’il en avait deux. La démocratie annoncée eût été effective si les trois Mousquetaires, qui sont quatre, n’avaient pas été trop arrogants pour faire se lover le colonel Lansana Conté pour confisquer le pouvoir, à son tour. Malgré tout, seul d’Artagnan a survécu et a pu atteindre le but supérieur de toutes ses aspiration : frimper sur le mât de cocagne, mais on croit qu’il veut en faire un peu trop.
Les grands psychologues et pédagogues disent qu’un bon chef n’est pas celui qui fait comme la mouche du coche, qui est au four et au moulin. Un hyperprésident n’est pas un bon président. Un bon chef est celui qui sait distribuer les rôles et les partitions rationnellement et adéquatement pour un concert harmonieux et sans fausse note. On dit cela entre parenthèses, parce qu’on ne sait trop quel emportement ou zèle a poussé la ministre des finances à venir passer un savon à l’hémicycle rectangulaire de Guinée pour ce qu’elle avait pris pour micmacs sur un faux avis déroutant concernant les voitures de dotation des députés.  Péché de jeunesse ?
 Damaro n’a rien dit sur ce pataquès d’une personnalité-clé du système de l’ami « alé-le-djö », mais il avait suffi que Zagamor, son sparring-partner de choix, le porte-parole de l’opposition qui ne sait plus exactement sur quel pied danser, touchât à une filandre pour qu’il lui souffle dessus …
Si la majorité des Guinéens sont des contestataires, de la résistance à la pénétration colonisation jusqu’aux élections démocratiques de 2010, il va s’en dire qu’ils continueront à contester indéfiniment tout ce qui est arbitraire et arrogant, cela doit être strictement connu. Faire fi de cette évidence est un fâcheux refus de voir, qui est pire que l’aveuglement. Et comme qui ne progresse pas recule, on ne sait dans quelle direction avancer.
 L’opposition avait des réclamations au sujet du processus électoral. Elle était dans sa légitimité constitutionnelle, mais il y a cas de force majeur : Il n’y a plus de sous, sans compter que les démembrements de la CENI à la base ne sont plus en place, sans compter que le redécoupage administratif était absolument nécessaire pour éviter l’éloignements, sans compter, quoi encore.Si elle refuse de voir tout cela, et on n’a pas tout dit, c’est aussi un aveuglement qui fait tomber les bras, puisque c’est elle qui va pleurnicher pour irrégularités et fraudes…
Et comme cela ne remplit pas la corbeille, à peine que le pouvoir a repris haleine que la voilà lui met la main au collet pour lui faire rendre-gorge de ses prodigalités électorales en greffant à ses revendications la baisse du prix des carburants, ce qui n’est pas véritablement dans ses cordes et qui ne lui est pas reconnu constitutionnellement, à moins qu’on ne se trompe.
Mais ce qui est renversant, c’est qu’elle décrète deux journées mortes, pour cause d’Ebola, et elle sollicite un cadre de dialogue pour mettre Mamady Youla dans ses petits souliers. Que veut réellement l’opposition guinéenne ? Que fera le pouvoir pour un apaisement social, au risque de sacrifier ce deuxième mandat, qui commence si mal ? Se saisir continuellement au collet est un divertissement qui retarde.

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