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Sidwaya (S.) : Quelle compréhension faut-il avoir du projet de retrait définitif des forces armées nationales de la politique ?
Pingrenoma Zagré (P. Z.) : Permettez-moi de remercier toute la presse pour l’accompagnement que les forces armées nationales ont toujours reçu dans l’accomplissement de leurs activités, aussi bien au plan national que sur les différents théâtres d’opération à l’extérieur. Ce qui permet de donner une lisibilité aux activités que nous menons.
S’agissant de cette cérémonie d’installation solennelle de la commission chargée de la réforme des forces armées nationales qui a été présidée le mardi 8 décembre 2015 par le président du Faso, cette reforme est soutenue par trois axes. Il s’agit de l’interdiction des militaires à s’ingérer dans la politique. Cette option s’appuie sur les expériences que les FAN ont connues au cours des années antérieures, qui ont été marquées par des rôles multiples joués par des militaires à divers niveaux de la vie nationale. Et des analyses précédentes, notamment l’étude prospective sur la défense nationale, un document de référence qui va servir à cette commission, était déjà arrivée à ce constat sur les effets négatifs de l’ingérence des militaires dans la vie politique. Du reste, cette disposition paraît dans la dernière loi adoptée cette année. Nous nous réjouissons que la commission mise en place puisse approfondir la question en vue de permettre aux FAN de s’en tenir à leur rôle, c’est-à-dire être subordonnées à l’autorité politique et être soumises au contrôle du pouvoir législatif. Le deuxième axe de cette réforme concerne la bonne gouvernance militaire. Cela prend en compte les différents déterminants sur lesquels les FAN doivent s’appuyer afin d’être efficaces dans l’accomplissement de leurs missions. Il s’agit d’une bonne maîtrise des ressources humaines, de la logistique ainsi que des questions relatives à l’opérationnalisation des forces et à l’exercice du commandement. Le troisième axe porte sur le renforcement de la responsabilité. Vous avez pu être témoins, notamment au cours de cette année 2015, avec les crises successives que nous avons connues, qu’il est important pour chaque chef militaire d’être conscient de son rôle et de ses responsabilités vis-à-vis de la nation, afin de permettre aux unités de se conformer aux missions qui leus sont confiées par la nation et la république. La commission va faire un état des lieux profond des FAN, examiner les différents défis qui se posent et enfin, formuler des recommandations qui feront l’objet d’un CASEM. Les propositions seront ensuite soumises à l’autorité politique pour que des directives soient données aux FAN afin de leur permettre de tenir une place qui convienne aux lois de la république.
S. : Est-ce à dire que désormais l’Armée devrait refuser de prendre ses responsabilités lorsqu’elle est appelée, par exemple en cas de crise, à s’assumer ?
P .Z. : Il est vrai qu’au cours de l’histoire du Burkina Faso, nous avons des circonstances diverses qui ont amené les FAN, parfois malgré elles, comme ce fut le cas en octobre dernier, d’intervenir sur la scène politique. En tant que tel, les FAN ont un devoir de prendre les dispositions pour préserver la souveraineté nationale. Nous avons l’assurance, qu’avec toutes les leçons que le peuple a pu tirer de la Transition et des 27 années du régime précédent, la Nation prendra toutes les dispositions pour renforcer les fondements démocratiques et que les FAN s’en tiennent à leur place, afin que l’on évite des situations de ce genre. Je suis optimiste quant aux perspectives pour notre pays, notamment le renforcement de la démocratie qui nous permettra, à l’instar de beaucoup d’autres pays en Afrique, où les FAN ne peuvent à être sujettes à l’ingérence politique.
S. : L’interdiction va-t-elle aussi concerner les nominations de militaires au poste de ministre ?
P. Z. : Le militaire est avant tout un citoyen, un serviteur de l’Etat. Il a des compétences qui peuvent servir un gouvernement à des postes divers. Sur cette base, il appartient à l’autorité politique d’apprécier l’opportunité de désigner un militaire à des fonctions administratives et techniques. Mais, je tiens à réaffirmer qu’avec les expériences antérieures, tout militaire, quel que soit son grade ou la position qu’il peut occuper, doit s’interdire de s’engager dans les organisations et partis politiques. Il doit observer la neutralité qui s’impose au militaire dans l’exercice de ses fonctions.
S. : Y-a-t-il des possibilités que ces réformes en perspective permettent la réintégration des militaires qui estiment avoir été abusivement radiés, suite aux mutineries de 2011 ?
P .Z. : Il est vrai que ces mutineries avaient donné lieu à la radiation de quelques centaines de militaires. Leur problème a été soumis à la Commission de la réconciliation nationale et des réformes. Aujourd’hui, le Haut conseil qui a été mis en place a le dossier en main. Je pense que la question sera approfondie pour voir quelle suite donner aux revendications de ces militaires radiés en 2011.
S. : La Transition a adopté une nouvelle loi sur le statut des FAN. Avec ces réformes annoncées, peut-on s’attendre à une autre révision de ce statut ?
P .Z. : La nouvelle loi a comme particularité d’avoir pris de nouvelles dispositions relatives au mariage. En effet, les militaires, notamment ceux du rang, étaient soumis à un délai de six ans avant de contracter un mariage. Ce délai a été ramené à quatre ans. Il y a aussi la disposition, dont nous venons de parler, interdisant aux militaires de s’engager en politique. La question de détachement ou de mise en disponibilité du militaire y est également traitée. Nous allons veiller à ce que, à travers cette réforme, notamment l’interdiction pour les militaires de faire de la politique, soit observée, pour permettre aux FAN d’affermir leur vocation au service de la nation.
S : Pour revenir sur cette loi, nous savons que la disposition qui a défrayé la chronique, c’est celle qui permet à un lieutenant-colonel d’être nommé général. Beaucoup de gens ont estimé que c’est un costume taillé à la mesure du Premier ministre Yacouba Isaac Zida. Comment avez-vous vécu cette polémique ?
P .Z. : Avant l’avènement de la Transition, dans la loi 049, s’agissant des dispositions relatives aux nominations des officiers au grade de général, il est dit : « La nomination au grade de général relève du pouvoir discrétionnaire du président du Faso. A titre normal, pour les colonels-majors diplômés de l’école de guerre et à titre exceptionnel, pour les colonels-majors ayant rendu d’éminents services ou des actions d’éclat au cours d’un conflit ». Au cours de cette Transition, tirant leçons des expériences que nous avons vécues, nous avons réaménagé l’ancienne loi sur les points que je viens de citer. Dans le projet de loi que nous avons soumis au gouvernent, les dispositions relatives à l’avancement des officiers au grade de général, étaient changées. Dans le processus d’examen du projet de loi, aux différents échelons, effectivement, il a été inséré le grade de lieutenant-colonel comme pouvant être nommé Général. Depuis le mois de juin de cette année, nous avons eu à formuler une volonté de voir s’en tenir aux anciennes dispositions. Le pouvoir du président du Faso étant, ceci a été fait. Au niveau de la commission chargée de la réforme des FAN, c’est une question qui reviendra certainement.
S. : Aux premières heures du putsch de la mi-septembre 2015, le peuple a attendu son Armée pour venir à son secours. On a eu l’impression que les FAN ont tardé avant de réagir. Que s’est-il passé ?
P. Z. : C’est exactement le 16 septembre, aux environs de 14h20 lorsque je terminais le Conseil d’administration de l’USFA que j’ai été appelé par le général Diendéré, m’informant de l’arrestation du Président du Faso et des membres du gouvernement. Sur le champ, j’ai réagi en disant que c’était un fait très grave qui venait d’être commis. J’ai ajouté que ce fait était en contradiction avec les efforts que nous étions en train de mener afin que les FAN se retirent entièrement de la vie politique. J’ai alors convoqué les chefs d’états-majors pour une réunion à 17h. J’y ai associé la commission de réflexion et d’aide à la décision, qui a été mise en place au cours de cette année 2015 et qui permet de traiter de certaines questions stratégiques. Nous avons également sollicité à la réunion son Excellence Jean-Baptiste Ouédraogo et Monseigneur Paul Ouédraogo. Au cours de cette rencontre qui a duré de l’après-midi du 16 septembre jusqu’au lendemain à 3heures et demie, de manière unanime, nous avons condamné le coup d’Etat. Nous nous sommes investis à convaincre Diendéré qui était assisté à la réunion du colonel-major Kéré, d’arrêter l’action qui était en cours, de procéder à la libération immédiate des membres du gouvernement et de se soumettre à l’autorité de la Transition. Nous avons dû, dans la même nuit, nous rendre au camp Naaba Koom pour y rencontrer une délégation des éléments de l’ex-RSP en vue de les persuader de revenir sur leur action, et leur montrer qu’il était totalement inadmissible pour des militaires, après tant de mois d’effort de la Transition pour permettre le retour à une vie constitutionnelle normale, de prendre de telles initiatives. Sur notre insistance, dans la même nuit, il a été procédé à la libération des quatre femmes ministres. Vous savez, un putsch de ce genre est une opération politique et militaire. A l’avènement du coup, nous ne savons pas s’il y avait des alliances sur lesquelles le général Diendéré s’appuyait pour dire qu’il avait le soutien de l’Armée. Donc, il fallait observer pour connaître l’environnement dans lequel nous sommes. Ce n’était pas une situation où le pays était en crise avec une force étrangère. Il s’agissait d’un contexte dans lequel, au sein d’une même Armée, des composantes, notamment le RSP, où nous savons très bien que c’était un groupuscule qui imposait son diktat. Nous avons analysé pour ne pas prendre de décisions précipitées qui allaient mettre en péril la vie des membres du gouvernement et donner lieu à une escalade de la violence. J’avais l’intime conviction qu’une option d’affrontement immédiat allait avoir des conséquences bien plus graves. Voici les raisons pour lesquelles, dans les premiers instants du putsch, nous nous sommes abstenus de tomber dans le piège que nous tendaient les éléments de l’ex-RSP.
S. : On a eu l’impression que la haute hiérarchie militaire a été débordée par de jeunes officiers qui ont décidé d’intervenir. Est-ce exact ?
P. Z. : Lorsqu’effectivement au niveau des garnisons quelques officiers ont pris contact avec moi, on a pris des options. J’ai dit qu’il fallait éviter toute décision précipitée qui allait mettre en péril la vie des membres du gouvernement et donner lieu à une escalade dont les conséquences allaient être bien plus dramatiques avec l’instauration d’un chaos et une insécurité généralisée à travers non seulement l’agglomération de la zone de Ouagadougou, mais au-delà, ce qui pouvait exposer notre pays à une insécurité au niveau de nos frontières. Voici un choix simple que j’ai fait lorsqu’au niveau des garnisons, on a pris contact avec moi. Il fallait éviter d’envoyer précipitamment des officiers à Ouagadougou qui n’ayant pas la même perception des choses, pouvaient eux-mêmes s’affronter. Voici les mesures de prudence que j’ai personnellement partagée avec les autres officiers. Lorsque les chefs de corps sont arrivés à Ouagadougou, il y avait deux options, soit aller à l’affrontement, soit avoir un mode d’action pour éviter l’affrontement. Et c’est ce mode d’action que nous avons privilégié. Je tiens à vous rassurer que dans ce concept d’opération, nous avons pleinement associé les chefs de corps qui sont venus des autres garnisons et ce mode d’action a été unanimement partagé. Voici comment cela s’est passé lorsque les officiers sont arrivés. Durant les jours qui ont suivi le putsch, il y a eu une stratégie de communication qui a été développée. Les chefs de corps étaient en contact avec leurs camarades qui étaient au RSP.
Au quotidien, nous avions des rencontres tous les soirs pour faire le point de la situation pendant que la troupe était mobilisée sur le terrain en train de dissuader les éléments du RSP sur le risque auquel ils s’exposeraient s’ils persistaient dans leur position. En ce qui nous concerne personnellement, nous n’avons pas cessé de maintenir le contact avec le général Diendéré et les officiers du RSP pour les convaincre du mauvais choix qu’ils avaient fait, qu’il fallait déposer les armes et se soumettre à l’autorité du chef d’état-major général des armées. C’est ce travail qui a permis de procéder à un changement de mentalité au niveau de la majorité des éléments du RSP et a permis d’éviter l’affrontement.
S. : Donc ça relevait plus de la stratégie puisqu’entre-temps l’on vous a prêté une certaine proximité avec le général Diendéré qui serait peut-être à la base de cette trop grande prudence ?
P. Z. : C’est vrai, le général Diendéré est un promotionnaire, j’en ai beaucoup au sein des forces armées nationales. Nous avons ensemble fréquenté l’école spéciale militaire de Saint Cyr. Chacun a eu son parcours professionnel. Il n’y a jamais été ni un confident ni un compagnon particulier pour moi. En tant que chef d’état-major général des armées, je dois avoir l’intelligence pour communiquer avec les hommes quel que soit leur rang, quel que soit leur niveau. Et c’est sur cette base qu’avec le général Diendéré comme les autres officiers du RSP, je suis resté en contact pour les convaincre qu’ils avaient fait un mauvais choix. Bien sûr, en dehors de ceux qui font l’objet de poursuite judiciaire, la justice dira ce qu’il en est. De manière unanime, au niveau du commandement, nous avons condamné ce coup d’Etat. Au niveau des relations du général Diendéré et moi, il n’y a jamais eu de
complicité, il n’y a jamais eu un appui quelconque que le général Diendéré pouvait attendre de ma part pour faire aboutir ce putsch.
S. : N’avez-vous pas senti ce coup de force venir puisqu’il y a eu des signes avant-coureurs avec ces conseils de ministres perturbés ?
P. Z. : Au cours de cette Transition, nous avons connu trois crises. Celles du 21 décembre, du 4 février et celle du 28 juin. Je tiens à vous rassurer qu’en tant que chef d’état-major général des armées, nous n’avons pas attendu septembre pour nous investir à convaincre les militaires de l’ex-RSP que les crises successives étaient de nature à nuire à la bonne conduite de la Transition à laquelle nous adhérons tous. Rassurez-vous que durant ces différentes crises, nous nous sommes investis à développer des entretiens avec les éléments du RSP pour les convaincre. C’est vrai, cette répétition de crises avec le putsch qui a eu lieu en septembre 2015 sont des éléments qui nous convainquent que ces crises n’étaient que des préludes à une stratégie qui avait été conçue par l’ex-RSP. En tant que chef
d’état-major général des armées, dès le mois de juin, nous avons mis en place un centre des opérations au regard des renseignements que nous avions sur les menaces qui pouvaient planer sur le Burkina Faso. Tel que le coup d’Etat est survenu, cela montre qu’il a été préparé. Nous étions conscients que la Transition était contrariée mais, ce coup d’Etat est une hypothèse.Vous savez que ceux qui sont à la base adoptent une stratégie pour espérer faire aboutir leur projet. Nous rendons grâce à Dieu de nous avoir permis d’éviter que la Transition soit remise en cause.
S. : Il y a également cette polémique de zéro mort durant l’assaut sur Naaba Koom II. Bon nombre d’observateurs ont du mal à croire à cela. Qu’en- est-il exactement ?
P. Z. : Effectivement, lorsque nous avons rendu compte au président du Faso du bilan de l’opération qui a été menée au Camp Naaba Koom II, le 29 septembre, beaucoup ont douté du fait qu’il n’y ait eu aucun mort. Mais, c’est la réalité, il n’y a eu aucun mort. C’était d’abord un choix d’éviter l’affrontement. Et si nous avons pu éviter les morts, c’est parce qu’il y a eu un travail au préalable de contact et de communication qui a convaincu les éléments de l’ex- RSP qui étaient sous la domination d’un groupuscule de déposer les armes et de se soumettre à l’autorité du chef d’état-major général des armées. C’est ce qui a été fait dans la soirée du 29 septembre lorsque nous avons commencé à envoyer les premiers tirs.
S. : Dites-nous comment se passe l’intégration des ex RSP au sein de l’armée régulière ?
P. Z. : Dès la dissolution de l’ex-RSP, nous avons développé une stratégie de communication. Les chefs d’état-major d’armées, les différents chefs commandant les régions, les chefs de corps ont été donc invités à accueillir les militaires de l’ex-RSP en tant que frères d’armes. Parce que nous avons compris qu’une majorité de ces militaires était en réalité manipulée. Et nous avons adressé des messages aux éléments de l’ex-RSP qu’ils font partie de la famille des forces armées nationales et qu’il n’y avait pas lieu de craindre pour leur sécurité tant qu’ils se soumettent aux lois de la République. Au cours des jours qui ont suivi, beaucoup de militaires ayant rejoint les différentes garnisons ont été accueillis avec fraternité. Je tiens à féliciter les militaires qui ont quitté les différentes garnisons qui ont fait un effort d’accueillir ceux de l’ex-RSP qui, aujourd’hui, ont repris les activités normales dans les unités et participent à la vie des forces armées nationales à l’instar des autres corps.
S. : Quelle est la situation de ceux qui sont toujours en cavale ?
P. Z. : C’est vrai qu’il y a actuellement un peu plus d’une dizaine en cavale. Lorsque le militaire est absent au-delà de six jours, il fait l’objet d’une mesure disciplinaire qui le place en position de déserteur. Donc les mesures disciplinaires ont été prises à l’encontre de tous ceux qui, au-delà de ce délai, ne se sont pas présentés.
S. : Quelle est la suite de la procédure judiciaire de ceux qui ont été arrêtés ?
P. Z. : Le personnel de l’ex RSP et ceux qui ne le sont pas, sont aux mains de la justice qui fait son travail.
S. : Des rumeurs ont fait cas de votre arrestation. Qu’en était-il exactement ?
P. Z. : Des rumeurs à Ouagadougou, on en entend tous les jours. J’ai été approché par des connaissances pour me faire part de cela. Mais, me concernant, je suis entièrement serein et j’accomplis la mission qui m’a été confiée par la nation. Je n’en fais pas une préoccupation.
S. : Deux généraux qui sont en prison. En marge de cette procédure judiciaire, est-ce qu’il y a des procédures disciplinaires en cours au sein de l’armée ?
P .Z. : Evidemment. S’agissant de ces deux généraux, ils ont fait l’objet de sanctions disciplinaires. Compte tenu de leur rang, ce sont des sanctions infligées par le ministre de la Défense à leur encontre. Ces sanctions disciplinaires, ce sont des jours d’arrêt.
S. : Une unité comme le RSP n’est-elle pas nécessaire dans l’armée ? Peut-on s’attendre à une réorganisation pour remettre en place une autre unité ?
P .Z. : Quand on voit ce que le RSP a pu montrer au cours de ces derniers mois à l’encontre des lois de la République, on ne sait pas si on peut parler d’unité d’élite. L’unité d’élite, c’est celle qui comprend sa mission et qui se subordonne à l’autorité politique, et qui se soumet aux institutions de la République. Les menaces qui sont dans l’environnement intérieur et extérieur du Burkina Faso nous ont amenés à créer le groupement des forces anti-terroristes, qui est doté de moyens particuliers, d’hommes entraînés et qui participent avec beaucoup de détermination à la sécurisation des frontières nord et ouest du Burkina Faso. Aujourd’hui, nous sommes dans un processus pour créer des forces spéciales. Nous avons le 25e régiment des forces parachutistes commando de Bobo-Dioulasso. Ce sont des hommes sélectionnés pour leur aptitude physique, morale et leur engagement. Ils ont un potentiel efficace pour faire face aux menaces et nous sommes en train de développer des stratégies afin de disposer de forces spéciales qui correspondent aux nouvelles menaces. Soyez
rassuré, le travail est en cours.
S. : Une unité spéciale par rapport à la sécurité présidentielle ?
P. Z. : Non, une force spéciale par rapport à la défense et à la sécurité du territoire national pour venir à bout des nouvelles menaces de terrorisme. S’agissant de la sécurité présidentielle, depuis la dissolution de l’ex- RSP, il a été mis en place un groupement de sécurité et protection républicaine qui est composé de
militaires des corps de troupes, de la gendarmerie nationale et des personnels de la police nationale. C’est une unité mixte qui assure au quotidien les missions de sécurité du président du Faso et des personnalités désignées pour bénéficier de la protection rapprochée.
S. : Quel est le résultat du dispositif sécuritaire mis en place pour répondre à l’attaque sanglante de Samorogouan ?
P. Z. : Depuis l’attaque, et même bien avant, nous avons dans la zone concernée un dispositif avec des éléments de la brigade territoriale de gendarmerie et de la police nationale en place. Donc depuis l’attaque, nous avons renforcé ces postes en hommes et en équipements, ce qui nous permet aujourd’hui d’avoir un bon contrôle des frontières et une sécurisation des populations dans la localité. Au cours de ma visite à Samorogouan, j’ai eu à échanger avec les populations et à solliciter leur collaboration de façon active avec les forces de défense et de sécurité à travers le renseignement. Cela est valable sur toute l’étendue du territoire, en ville comme en campagne.
S. : Visiblement, ce qui fait défaut dans la protection des biens et des personnes, c’est la logistique. Est-ce que vous confirmez ?
P .Z. : Pour ce qui est de la logistique, des efforts ont été faits au cours de l’année par le gouvernement pour accroitre les capacités des Forces armées nationales (FAN). Sur ce point, nous venons de terminer une étude sur l’équipement des FAN et nous savons qu’en matière de moyens de défense, aucun pays ne peut s’auto-suffire. Il faut chaque fois adapter les moyens à la nature des menaces. Aujourd’hui le Burkina Faso en raison de sa situation géographique et de la multiplicité des actes terroristes, entend de redynamiser les FAN afin de permettre aux hommes d’accomplir au mieux les missions.
Pingrenoma Zagré (P. Z.) : Permettez-moi de remercier toute la presse pour l’accompagnement que les forces armées nationales ont toujours reçu dans l’accomplissement de leurs activités, aussi bien au plan national que sur les différents théâtres d’opération à l’extérieur. Ce qui permet de donner une lisibilité aux activités que nous menons.
S’agissant de cette cérémonie d’installation solennelle de la commission chargée de la réforme des forces armées nationales qui a été présidée le mardi 8 décembre 2015 par le président du Faso, cette reforme est soutenue par trois axes. Il s’agit de l’interdiction des militaires à s’ingérer dans la politique. Cette option s’appuie sur les expériences que les FAN ont connues au cours des années antérieures, qui ont été marquées par des rôles multiples joués par des militaires à divers niveaux de la vie nationale. Et des analyses précédentes, notamment l’étude prospective sur la défense nationale, un document de référence qui va servir à cette commission, était déjà arrivée à ce constat sur les effets négatifs de l’ingérence des militaires dans la vie politique. Du reste, cette disposition paraît dans la dernière loi adoptée cette année. Nous nous réjouissons que la commission mise en place puisse approfondir la question en vue de permettre aux FAN de s’en tenir à leur rôle, c’est-à-dire être subordonnées à l’autorité politique et être soumises au contrôle du pouvoir législatif. Le deuxième axe de cette réforme concerne la bonne gouvernance militaire. Cela prend en compte les différents déterminants sur lesquels les FAN doivent s’appuyer afin d’être efficaces dans l’accomplissement de leurs missions. Il s’agit d’une bonne maîtrise des ressources humaines, de la logistique ainsi que des questions relatives à l’opérationnalisation des forces et à l’exercice du commandement. Le troisième axe porte sur le renforcement de la responsabilité. Vous avez pu être témoins, notamment au cours de cette année 2015, avec les crises successives que nous avons connues, qu’il est important pour chaque chef militaire d’être conscient de son rôle et de ses responsabilités vis-à-vis de la nation, afin de permettre aux unités de se conformer aux missions qui leus sont confiées par la nation et la république. La commission va faire un état des lieux profond des FAN, examiner les différents défis qui se posent et enfin, formuler des recommandations qui feront l’objet d’un CASEM. Les propositions seront ensuite soumises à l’autorité politique pour que des directives soient données aux FAN afin de leur permettre de tenir une place qui convienne aux lois de la république.
S. : Est-ce à dire que désormais l’Armée devrait refuser de prendre ses responsabilités lorsqu’elle est appelée, par exemple en cas de crise, à s’assumer ?
P .Z. : Il est vrai qu’au cours de l’histoire du Burkina Faso, nous avons des circonstances diverses qui ont amené les FAN, parfois malgré elles, comme ce fut le cas en octobre dernier, d’intervenir sur la scène politique. En tant que tel, les FAN ont un devoir de prendre les dispositions pour préserver la souveraineté nationale. Nous avons l’assurance, qu’avec toutes les leçons que le peuple a pu tirer de la Transition et des 27 années du régime précédent, la Nation prendra toutes les dispositions pour renforcer les fondements démocratiques et que les FAN s’en tiennent à leur place, afin que l’on évite des situations de ce genre. Je suis optimiste quant aux perspectives pour notre pays, notamment le renforcement de la démocratie qui nous permettra, à l’instar de beaucoup d’autres pays en Afrique, où les FAN ne peuvent à être sujettes à l’ingérence politique.
S. : L’interdiction va-t-elle aussi concerner les nominations de militaires au poste de ministre ?
P. Z. : Le militaire est avant tout un citoyen, un serviteur de l’Etat. Il a des compétences qui peuvent servir un gouvernement à des postes divers. Sur cette base, il appartient à l’autorité politique d’apprécier l’opportunité de désigner un militaire à des fonctions administratives et techniques. Mais, je tiens à réaffirmer qu’avec les expériences antérieures, tout militaire, quel que soit son grade ou la position qu’il peut occuper, doit s’interdire de s’engager dans les organisations et partis politiques. Il doit observer la neutralité qui s’impose au militaire dans l’exercice de ses fonctions.
S. : Y-a-t-il des possibilités que ces réformes en perspective permettent la réintégration des militaires qui estiment avoir été abusivement radiés, suite aux mutineries de 2011 ?
P .Z. : Il est vrai que ces mutineries avaient donné lieu à la radiation de quelques centaines de militaires. Leur problème a été soumis à la Commission de la réconciliation nationale et des réformes. Aujourd’hui, le Haut conseil qui a été mis en place a le dossier en main. Je pense que la question sera approfondie pour voir quelle suite donner aux revendications de ces militaires radiés en 2011.
S. : La Transition a adopté une nouvelle loi sur le statut des FAN. Avec ces réformes annoncées, peut-on s’attendre à une autre révision de ce statut ?
P .Z. : La nouvelle loi a comme particularité d’avoir pris de nouvelles dispositions relatives au mariage. En effet, les militaires, notamment ceux du rang, étaient soumis à un délai de six ans avant de contracter un mariage. Ce délai a été ramené à quatre ans. Il y a aussi la disposition, dont nous venons de parler, interdisant aux militaires de s’engager en politique. La question de détachement ou de mise en disponibilité du militaire y est également traitée. Nous allons veiller à ce que, à travers cette réforme, notamment l’interdiction pour les militaires de faire de la politique, soit observée, pour permettre aux FAN d’affermir leur vocation au service de la nation.
S : Pour revenir sur cette loi, nous savons que la disposition qui a défrayé la chronique, c’est celle qui permet à un lieutenant-colonel d’être nommé général. Beaucoup de gens ont estimé que c’est un costume taillé à la mesure du Premier ministre Yacouba Isaac Zida. Comment avez-vous vécu cette polémique ?
P .Z. : Avant l’avènement de la Transition, dans la loi 049, s’agissant des dispositions relatives aux nominations des officiers au grade de général, il est dit : « La nomination au grade de général relève du pouvoir discrétionnaire du président du Faso. A titre normal, pour les colonels-majors diplômés de l’école de guerre et à titre exceptionnel, pour les colonels-majors ayant rendu d’éminents services ou des actions d’éclat au cours d’un conflit ». Au cours de cette Transition, tirant leçons des expériences que nous avons vécues, nous avons réaménagé l’ancienne loi sur les points que je viens de citer. Dans le projet de loi que nous avons soumis au gouvernent, les dispositions relatives à l’avancement des officiers au grade de général, étaient changées. Dans le processus d’examen du projet de loi, aux différents échelons, effectivement, il a été inséré le grade de lieutenant-colonel comme pouvant être nommé Général. Depuis le mois de juin de cette année, nous avons eu à formuler une volonté de voir s’en tenir aux anciennes dispositions. Le pouvoir du président du Faso étant, ceci a été fait. Au niveau de la commission chargée de la réforme des FAN, c’est une question qui reviendra certainement.
S. : Aux premières heures du putsch de la mi-septembre 2015, le peuple a attendu son Armée pour venir à son secours. On a eu l’impression que les FAN ont tardé avant de réagir. Que s’est-il passé ?
P. Z. : C’est exactement le 16 septembre, aux environs de 14h20 lorsque je terminais le Conseil d’administration de l’USFA que j’ai été appelé par le général Diendéré, m’informant de l’arrestation du Président du Faso et des membres du gouvernement. Sur le champ, j’ai réagi en disant que c’était un fait très grave qui venait d’être commis. J’ai ajouté que ce fait était en contradiction avec les efforts que nous étions en train de mener afin que les FAN se retirent entièrement de la vie politique. J’ai alors convoqué les chefs d’états-majors pour une réunion à 17h. J’y ai associé la commission de réflexion et d’aide à la décision, qui a été mise en place au cours de cette année 2015 et qui permet de traiter de certaines questions stratégiques. Nous avons également sollicité à la réunion son Excellence Jean-Baptiste Ouédraogo et Monseigneur Paul Ouédraogo. Au cours de cette rencontre qui a duré de l’après-midi du 16 septembre jusqu’au lendemain à 3heures et demie, de manière unanime, nous avons condamné le coup d’Etat. Nous nous sommes investis à convaincre Diendéré qui était assisté à la réunion du colonel-major Kéré, d’arrêter l’action qui était en cours, de procéder à la libération immédiate des membres du gouvernement et de se soumettre à l’autorité de la Transition. Nous avons dû, dans la même nuit, nous rendre au camp Naaba Koom pour y rencontrer une délégation des éléments de l’ex-RSP en vue de les persuader de revenir sur leur action, et leur montrer qu’il était totalement inadmissible pour des militaires, après tant de mois d’effort de la Transition pour permettre le retour à une vie constitutionnelle normale, de prendre de telles initiatives. Sur notre insistance, dans la même nuit, il a été procédé à la libération des quatre femmes ministres. Vous savez, un putsch de ce genre est une opération politique et militaire. A l’avènement du coup, nous ne savons pas s’il y avait des alliances sur lesquelles le général Diendéré s’appuyait pour dire qu’il avait le soutien de l’Armée. Donc, il fallait observer pour connaître l’environnement dans lequel nous sommes. Ce n’était pas une situation où le pays était en crise avec une force étrangère. Il s’agissait d’un contexte dans lequel, au sein d’une même Armée, des composantes, notamment le RSP, où nous savons très bien que c’était un groupuscule qui imposait son diktat. Nous avons analysé pour ne pas prendre de décisions précipitées qui allaient mettre en péril la vie des membres du gouvernement et donner lieu à une escalade de la violence. J’avais l’intime conviction qu’une option d’affrontement immédiat allait avoir des conséquences bien plus graves. Voici les raisons pour lesquelles, dans les premiers instants du putsch, nous nous sommes abstenus de tomber dans le piège que nous tendaient les éléments de l’ex-RSP.
S. : On a eu l’impression que la haute hiérarchie militaire a été débordée par de jeunes officiers qui ont décidé d’intervenir. Est-ce exact ?
P. Z. : Lorsqu’effectivement au niveau des garnisons quelques officiers ont pris contact avec moi, on a pris des options. J’ai dit qu’il fallait éviter toute décision précipitée qui allait mettre en péril la vie des membres du gouvernement et donner lieu à une escalade dont les conséquences allaient être bien plus dramatiques avec l’instauration d’un chaos et une insécurité généralisée à travers non seulement l’agglomération de la zone de Ouagadougou, mais au-delà, ce qui pouvait exposer notre pays à une insécurité au niveau de nos frontières. Voici un choix simple que j’ai fait lorsqu’au niveau des garnisons, on a pris contact avec moi. Il fallait éviter d’envoyer précipitamment des officiers à Ouagadougou qui n’ayant pas la même perception des choses, pouvaient eux-mêmes s’affronter. Voici les mesures de prudence que j’ai personnellement partagée avec les autres officiers. Lorsque les chefs de corps sont arrivés à Ouagadougou, il y avait deux options, soit aller à l’affrontement, soit avoir un mode d’action pour éviter l’affrontement. Et c’est ce mode d’action que nous avons privilégié. Je tiens à vous rassurer que dans ce concept d’opération, nous avons pleinement associé les chefs de corps qui sont venus des autres garnisons et ce mode d’action a été unanimement partagé. Voici comment cela s’est passé lorsque les officiers sont arrivés. Durant les jours qui ont suivi le putsch, il y a eu une stratégie de communication qui a été développée. Les chefs de corps étaient en contact avec leurs camarades qui étaient au RSP.
Au quotidien, nous avions des rencontres tous les soirs pour faire le point de la situation pendant que la troupe était mobilisée sur le terrain en train de dissuader les éléments du RSP sur le risque auquel ils s’exposeraient s’ils persistaient dans leur position. En ce qui nous concerne personnellement, nous n’avons pas cessé de maintenir le contact avec le général Diendéré et les officiers du RSP pour les convaincre du mauvais choix qu’ils avaient fait, qu’il fallait déposer les armes et se soumettre à l’autorité du chef d’état-major général des armées. C’est ce travail qui a permis de procéder à un changement de mentalité au niveau de la majorité des éléments du RSP et a permis d’éviter l’affrontement.
S. : Donc ça relevait plus de la stratégie puisqu’entre-temps l’on vous a prêté une certaine proximité avec le général Diendéré qui serait peut-être à la base de cette trop grande prudence ?
P. Z. : C’est vrai, le général Diendéré est un promotionnaire, j’en ai beaucoup au sein des forces armées nationales. Nous avons ensemble fréquenté l’école spéciale militaire de Saint Cyr. Chacun a eu son parcours professionnel. Il n’y a jamais été ni un confident ni un compagnon particulier pour moi. En tant que chef d’état-major général des armées, je dois avoir l’intelligence pour communiquer avec les hommes quel que soit leur rang, quel que soit leur niveau. Et c’est sur cette base qu’avec le général Diendéré comme les autres officiers du RSP, je suis resté en contact pour les convaincre qu’ils avaient fait un mauvais choix. Bien sûr, en dehors de ceux qui font l’objet de poursuite judiciaire, la justice dira ce qu’il en est. De manière unanime, au niveau du commandement, nous avons condamné ce coup d’Etat. Au niveau des relations du général Diendéré et moi, il n’y a jamais eu de
complicité, il n’y a jamais eu un appui quelconque que le général Diendéré pouvait attendre de ma part pour faire aboutir ce putsch.
S. : N’avez-vous pas senti ce coup de force venir puisqu’il y a eu des signes avant-coureurs avec ces conseils de ministres perturbés ?
P. Z. : Au cours de cette Transition, nous avons connu trois crises. Celles du 21 décembre, du 4 février et celle du 28 juin. Je tiens à vous rassurer qu’en tant que chef d’état-major général des armées, nous n’avons pas attendu septembre pour nous investir à convaincre les militaires de l’ex-RSP que les crises successives étaient de nature à nuire à la bonne conduite de la Transition à laquelle nous adhérons tous. Rassurez-vous que durant ces différentes crises, nous nous sommes investis à développer des entretiens avec les éléments du RSP pour les convaincre. C’est vrai, cette répétition de crises avec le putsch qui a eu lieu en septembre 2015 sont des éléments qui nous convainquent que ces crises n’étaient que des préludes à une stratégie qui avait été conçue par l’ex-RSP. En tant que chef
d’état-major général des armées, dès le mois de juin, nous avons mis en place un centre des opérations au regard des renseignements que nous avions sur les menaces qui pouvaient planer sur le Burkina Faso. Tel que le coup d’Etat est survenu, cela montre qu’il a été préparé. Nous étions conscients que la Transition était contrariée mais, ce coup d’Etat est une hypothèse.Vous savez que ceux qui sont à la base adoptent une stratégie pour espérer faire aboutir leur projet. Nous rendons grâce à Dieu de nous avoir permis d’éviter que la Transition soit remise en cause.
S. : Il y a également cette polémique de zéro mort durant l’assaut sur Naaba Koom II. Bon nombre d’observateurs ont du mal à croire à cela. Qu’en- est-il exactement ?
P. Z. : Effectivement, lorsque nous avons rendu compte au président du Faso du bilan de l’opération qui a été menée au Camp Naaba Koom II, le 29 septembre, beaucoup ont douté du fait qu’il n’y ait eu aucun mort. Mais, c’est la réalité, il n’y a eu aucun mort. C’était d’abord un choix d’éviter l’affrontement. Et si nous avons pu éviter les morts, c’est parce qu’il y a eu un travail au préalable de contact et de communication qui a convaincu les éléments de l’ex- RSP qui étaient sous la domination d’un groupuscule de déposer les armes et de se soumettre à l’autorité du chef d’état-major général des armées. C’est ce qui a été fait dans la soirée du 29 septembre lorsque nous avons commencé à envoyer les premiers tirs.
S. : Dites-nous comment se passe l’intégration des ex RSP au sein de l’armée régulière ?
P. Z. : Dès la dissolution de l’ex-RSP, nous avons développé une stratégie de communication. Les chefs d’état-major d’armées, les différents chefs commandant les régions, les chefs de corps ont été donc invités à accueillir les militaires de l’ex-RSP en tant que frères d’armes. Parce que nous avons compris qu’une majorité de ces militaires était en réalité manipulée. Et nous avons adressé des messages aux éléments de l’ex-RSP qu’ils font partie de la famille des forces armées nationales et qu’il n’y avait pas lieu de craindre pour leur sécurité tant qu’ils se soumettent aux lois de la République. Au cours des jours qui ont suivi, beaucoup de militaires ayant rejoint les différentes garnisons ont été accueillis avec fraternité. Je tiens à féliciter les militaires qui ont quitté les différentes garnisons qui ont fait un effort d’accueillir ceux de l’ex-RSP qui, aujourd’hui, ont repris les activités normales dans les unités et participent à la vie des forces armées nationales à l’instar des autres corps.
S. : Quelle est la situation de ceux qui sont toujours en cavale ?
P. Z. : C’est vrai qu’il y a actuellement un peu plus d’une dizaine en cavale. Lorsque le militaire est absent au-delà de six jours, il fait l’objet d’une mesure disciplinaire qui le place en position de déserteur. Donc les mesures disciplinaires ont été prises à l’encontre de tous ceux qui, au-delà de ce délai, ne se sont pas présentés.
S. : Quelle est la suite de la procédure judiciaire de ceux qui ont été arrêtés ?
P. Z. : Le personnel de l’ex RSP et ceux qui ne le sont pas, sont aux mains de la justice qui fait son travail.
S. : Des rumeurs ont fait cas de votre arrestation. Qu’en était-il exactement ?
P. Z. : Des rumeurs à Ouagadougou, on en entend tous les jours. J’ai été approché par des connaissances pour me faire part de cela. Mais, me concernant, je suis entièrement serein et j’accomplis la mission qui m’a été confiée par la nation. Je n’en fais pas une préoccupation.
S. : Deux généraux qui sont en prison. En marge de cette procédure judiciaire, est-ce qu’il y a des procédures disciplinaires en cours au sein de l’armée ?
P .Z. : Evidemment. S’agissant de ces deux généraux, ils ont fait l’objet de sanctions disciplinaires. Compte tenu de leur rang, ce sont des sanctions infligées par le ministre de la Défense à leur encontre. Ces sanctions disciplinaires, ce sont des jours d’arrêt.
S. : Une unité comme le RSP n’est-elle pas nécessaire dans l’armée ? Peut-on s’attendre à une réorganisation pour remettre en place une autre unité ?
P .Z. : Quand on voit ce que le RSP a pu montrer au cours de ces derniers mois à l’encontre des lois de la République, on ne sait pas si on peut parler d’unité d’élite. L’unité d’élite, c’est celle qui comprend sa mission et qui se subordonne à l’autorité politique, et qui se soumet aux institutions de la République. Les menaces qui sont dans l’environnement intérieur et extérieur du Burkina Faso nous ont amenés à créer le groupement des forces anti-terroristes, qui est doté de moyens particuliers, d’hommes entraînés et qui participent avec beaucoup de détermination à la sécurisation des frontières nord et ouest du Burkina Faso. Aujourd’hui, nous sommes dans un processus pour créer des forces spéciales. Nous avons le 25e régiment des forces parachutistes commando de Bobo-Dioulasso. Ce sont des hommes sélectionnés pour leur aptitude physique, morale et leur engagement. Ils ont un potentiel efficace pour faire face aux menaces et nous sommes en train de développer des stratégies afin de disposer de forces spéciales qui correspondent aux nouvelles menaces. Soyez
rassuré, le travail est en cours.
S. : Une unité spéciale par rapport à la sécurité présidentielle ?
P. Z. : Non, une force spéciale par rapport à la défense et à la sécurité du territoire national pour venir à bout des nouvelles menaces de terrorisme. S’agissant de la sécurité présidentielle, depuis la dissolution de l’ex- RSP, il a été mis en place un groupement de sécurité et protection républicaine qui est composé de
militaires des corps de troupes, de la gendarmerie nationale et des personnels de la police nationale. C’est une unité mixte qui assure au quotidien les missions de sécurité du président du Faso et des personnalités désignées pour bénéficier de la protection rapprochée.
S. : Quel est le résultat du dispositif sécuritaire mis en place pour répondre à l’attaque sanglante de Samorogouan ?
P. Z. : Depuis l’attaque, et même bien avant, nous avons dans la zone concernée un dispositif avec des éléments de la brigade territoriale de gendarmerie et de la police nationale en place. Donc depuis l’attaque, nous avons renforcé ces postes en hommes et en équipements, ce qui nous permet aujourd’hui d’avoir un bon contrôle des frontières et une sécurisation des populations dans la localité. Au cours de ma visite à Samorogouan, j’ai eu à échanger avec les populations et à solliciter leur collaboration de façon active avec les forces de défense et de sécurité à travers le renseignement. Cela est valable sur toute l’étendue du territoire, en ville comme en campagne.
S. : Visiblement, ce qui fait défaut dans la protection des biens et des personnes, c’est la logistique. Est-ce que vous confirmez ?
P .Z. : Pour ce qui est de la logistique, des efforts ont été faits au cours de l’année par le gouvernement pour accroitre les capacités des Forces armées nationales (FAN). Sur ce point, nous venons de terminer une étude sur l’équipement des FAN et nous savons qu’en matière de moyens de défense, aucun pays ne peut s’auto-suffire. Il faut chaque fois adapter les moyens à la nature des menaces. Aujourd’hui le Burkina Faso en raison de sa situation géographique et de la multiplicité des actes terroristes, entend de redynamiser les FAN afin de permettre aux hommes d’accomplir au mieux les missions.
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