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vendredi 3 juillet 2015

Fadel Barro du mouvement Y’en a marre du Sénégal : « C’est faire un mauvais procès au Balai citoyen en pensant que c’est eux qui ont amené les militaires au pouvoir »

Parrain de la onzième édition du festival ciné droit libre, le journaliste sénégalais et coordinateur du mouvement citoyen Y’en a marre, Fadel Barro , est depuis quelques jours à Ouagadougou. On se rappelle que son mouvement était aux avant postes des actions qui ont pu barrer la route du palais présidentiel à Abdoulaye Wade (il voulait un troisième mandat). Convaincu du nouveau type africain (NTA) qui instaurera un véritable changement sur le continent, le journaliste engagé que nous avons rencontré se prononce dans cette interview sur le financement des mouvements sociaux. Il ne manque pas d’encourager le balai citoyen à poursuivre la lutte.
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Fadel Barro du mouvement Y’en a marre  du Sénégal : « C’est faire un mauvais procès au Balai citoyen en pensant que c’est eux qui ont amené les militaires au pouvoir »
Fadel Barro, parrain de la 11ème édition du festival ciné droit libre, qu’est- ce que cela vous inspire ?
Il faut comprendre que ce n’est la personne de Fadel Barro,à qui, on a confié le parrainage de cette 11èmeédition du festival ciné droit libre. C’est plutôt à cette jeunesse africaine qui est en train de s’émanciper, qui est en train d’abattre un travail formidable que le festival rend hommage. A travers donc ma personne, c’est toute la jeunesse africaine qui est dans l’anonymat, hors des spectacles, des médias mais qui est en train de faire un travail remarquable pour un véritable changement en Afrique. Je suis très heureux et satisfait de parrainer cette édition post insurrectionnelle du festival. Et je dédie ce parrainage à toute la jeunesse africaine.
Le mouvement « Y’en a marre » a été d’une grande inspiration de nombre de jeunes africains. Sont de ces jeunes, ceux du Burkina à travers le Balai citoyen. Et on sait quel rôle le Balai citoyen a joué dans la chute de Blaise Compaoré. Vous devez en être fier ?
Je dirai plutôt que le mouvement « Y’en a marre » s’est inspiré du peuple burkinabè. Depuis la mort de feu Président Thomas Sankara, de Norbert Zongo, c’est un peuple qui n’a jamais lâché prise. Il s’est toujours battu. A cela s’ajoute la jeunesse nigérienne qui s’est aussi battue contre la modification de leur Constitution. Y’en a marre s’est donc inspiré de tous ces combats pour dire NON à Abdoulaye Wade lorsque celui-ci voulait briguer un troisième mandat. 
Alors si en retour le Balai citoyen s’inspire de notre mouvement, si Filimbi s’inspire de « Y’en a marre » et du « Balai citoyen », si les « jeunes et forts » du Cameroun s’inspirent de toutes ces expériences, cela voudrait bien confirmer qu’il y a un boomerang en Afrique qui est en train de prendre forme. C’est donc une expérience africaine qui se dessine à travers ces mouvements citoyens pour un véritable changement dans nos pays.
Oui, ces mouvements ont certes fait leur preuve en matière de changement politique. Mais de plus en plus, ils sont « vomis » par une certaine frange de la société qui estime qu’ils reçoivent des financements pour troubler l’ordre social. Quels sont justement vos sources de financements ?
Il y a beaucoup de rumeurs sur cette question de financement des mouvements citoyens en Afrique notamment sur « Y’en a marre ». Mais je peux vous assurer que ce sont tout simplement des mensonges, des désinformations et des manipulations parce qu’il y a des gens qui cherchent à nous discréditer. Depuis le début de notre lutte, nous sommes restés indépendants - financièrement - en organisant la vente du tee-shirt de notre mouvement. 
De la naissance du mouvement en janvier 2011 jusqu’au départ d’Abdoulaye Wade, on n’avait pas de projet à soumettre aux ONGs. On avait juste organisé des rassemblements, fait de porte-à-porte, organisé des concerts…. Mais cela n’engrangeait pas beaucoup d’argent. 
Les moyens financiers que nous avons eus pour continuer le combat a été la vente de nos tee-shirts. Je rappelle que nous les vendons à 7000F parce qu’ils étaient de qualité et pendant toute la campagne, nous avons vendu près de 100 000. Et ce sont des sénégalais qui l’ont acheté, et, qui pouvaient s’unir commander des milliers qu’ils distribuaient à d’autres.
Et ensuite ?
Après le départ d’Abdoulaye Wade, pour maintenir l’existence du mouvement (parce qu’il n’y avait plus de défis, mais aussi, les gens ne s’intéressaient plus aux mouvements sociaux, et on ne pouvait continuer à réclamer), nous avons écrit des projets structurels que nous avons muris. Ces projets consistent à mettre en place des observatoires sur la démocratie et la bonne gouvernance partout dans le pays. Elle a constitué aussi, à avoir un site de monitoring ou les gens peuvent témoigner, à former les jeunes sur les mécanismes de gouvernance, à les familiariser avec les Institutions, à organiser les grands foras qu’on appelle les jurys populaires ou citoyens qui consistent à amener les députés et les élus locaux devant les populations pour rendre compte.
A Y’en a marre, nous avons un programme de société qui s’appelle TabakYelekl (en wolof) qui veut dire CONSTRUIRE l’AVENIR. Et ce sont des projets que nous avons soumis à des ONGs partenaires.
Des ONGs dont nous sommes sûrs que la provenance des fonds est licite, tels qu’Oxfam, Osiwa, la fondation Ford. Ils nous ont effectivement accompagnés dans la mise en œuvre du projet qui a duré un an et demi. Nous discutons actuellement avec la Fondation Ford pour la deuxième phase.
Ils vous ont financé à quelle hauteur ?
Nous avons au total plus de 120 millions FCFA. Cela a servi à financer nos projets et ce sont les cellules de « Y’en a marre » dans les différentes localités du Sénégal qui en ont le plus bénéficié. En effet, le projet les a aidées à avoir des sièges, du matériel, à financer leur formation.
Ce sont des personnes malintentionnées et qui ne pensent pas que les jeunes africains sont capables de s’émanciper, de conceptualiser et d’organiser dans le temps et dans l’espace, qui passent leur temps à croire qu’il y a forcément une main invisible qui soutient nos luttes. 
Je tiens alors à préciser que les seules personnes qui sont derrière nous sont les peuples. C’est idem pour le balai citoyen, c’est idem pour Filimbi, idem pour les Sofa….
Je connais la détermination de ces jeunes parce que je travaille avec eux depuis un certain moment et ce qui nous motive, ce n’est pas de l’argent. Si c’était le cas, on aurait travaillé avec les chefs d’Etat que nous combattons parce que non seulement ils sont riches et ils sont prêts à mettre des milliards pour qu’on leur foute la paix. C’est simplement malheureux pour ces personnes qui pensent que l’Occident notamment la France, les USA nous financent. Nous, nous sommes des sankaristes. 
Il faut certes poser le débat sur le financement des mouvements, mais des gens sont manipulés pour que nos voix ne soient plus crédibles. Et nous, nous n’avons pas peur des critiques.

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