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mercredi 1 avril 2015

Gambie: Yaya Jammeh « tombe » à Genève

La Gambie fait fi des mises en garde des Nations unies sur la détérioration de la situation des droits humains. La Gambie a fait preuve de mépris à l’égard de la communauté internationale en refusant tout un ensemble de recommandations visant à remédier à la détérioration de la situation des droits humains, a déclaré Amnesty International. Le gouvernement gambien n’a accepté que 93 des 171 recommandations émises dans le cadre de son Examen périodique universel (EPU) aux Nations unies, à Genève.
« Le nombre élevé de refus sur des questions cruciales en matière de droits humains montre que le gouvernement est peu disposé à remédier à la situation déplorable des droits humains – et notamment aux restrictions injustifiées au droit à la liberté d’expression, aux disparitions forcées et au recours à la torture pour étouffer l’opposition », a déclaré Sabrina Mahtani, spécialiste de l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.
« Les défenseurs des droits humains, journalistes et personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées sont pris pour cibles, et la situation des droits humains en Gambie continuera à se dégrader à moins que la communauté internationale ne s’emploie à inciter la Gambie à adhérer véritablement aux recommandations qu’elle a rejetées. »
Durant son EPU, la Gambie a répondu à 171 questions, commentaires et recommandations émanant de plus de 60 pays exhortant les autorités à en faire plus pour promouvoir et protéger les droits humains. Bien qu’il ait ajourné l’adoption des conclusions de l’EPU la semaine dernière à la dernière minute, le gouvernement a déçu en s’abstenant d’envoyer une délégation à Genève, choisissant plutôt de soumettre ses réponses par écrit.
Le Gambie n’a pas accepté les recommandations concernant la ratification de la Convention des Nations unies contre la torture, émises par 13 États, ou portant sur l’abolition de la peine de mort. Le gouvernement a également rejeté la dépénalisation de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre, ainsi que la coopération avec les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme des Nations unies. Il a également refusé les recommandations l’invitant à modifier la législation afin de lever les restrictions pesant sur la liberté d’expression.
La situation des droits humains dans le pays s’est fortement détériorée depuis l’EPU de la Gambie en 2014. En mars 2014, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture a diffusé un rapport soulignant le risque élevé de torture, d’arrestations arbitraires et de disparitions forcées dans le pays.
Le rapporteur spécial sur la torture et le rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires se sont rendus en Gambie en novembre 2014. Durant cette mission, ils n’ont pas été autorisés à accéder au quartier de haute sécurité de la prison centrale Mile 2, dans la capitale, Banjul, où sont détenus les condamnés à mort. Ces restrictions sont sans précédent depuis l’établissement du mandat du rapporteur spécial sur la torture, il y a 30 ans.
Le président Yahya Jammeh a signé en octobre 2014 une modification apportée au Code pénal qui introduit des peines encore plus sévères pour les personnes LGBTI, désormais passibles de la réclusion à perpétuité pour « homosexualité aggravée ». Et ce, malgré de nombreuses recommandations visant à l’en dissuader durant l’EPU. Au moins 14 personnes ont été arrêtées en novembre et décembre 2014 en raison de leur orientation sexuelle présumée.
Depuis début janvier 2015, les organes gambiens chargés de l’application des lois ont arrêté au moins 30 proches de personnes soupçonnées d’avoir pris part au coup d’État manqué du 30 décembre 2014. Certaines personnes ont été remises en liberté mais d’autres n’ont pas reparu depuis près de trois mois et on ignore combien se trouvent encore en détention au secret.
Le 14 janvier 2015, le président Jammeh a annoncé que son gouvernement était prêt à travailler en coopération avec les Nations unies pour enquêter sur les événements du 30 décembre. Le 28 février 2015, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, a adopté une résolution sur l’organisation d’une mission d’établissement des faits. Aucune enquête indépendante n’a cependant été menée. Une cour martiale a été instituée pour juger les six soldats qui auraient participé à la tentative de coup d’État. Le procès se déroule à huis clos, sans que les médias ne puissent le couvrir. Si ces hommes sont déclarés coupables, ils encourent la peine de mort.
« La Gambie doit garantir que les droits de la défense des accusés soient respectés. Elle doit coopérer avec la communauté internationale et diligenter dans les meilleurs délais des enquêtes impartiales et indépendantes sur les événements ayant mené au coup d’État et sur la réaction gouvernementale consécutive qui a débouché sur ces arrestations et incarcérations », a déclaré Sabrina Mahtani.
« Les États membres des Nations unies doivent favoriser une implication plus forte face à la détérioration de la situation des droits humains en Gambie et à son manque de respect pour les mécanismes internationaux relatifs aux droits humains. La Gambie doit sans tarder mettre en œuvre les recommandations qu’elle a acceptées, et accepter celles qu’elle a rejetées sur les questions fondamentales en matière de droits humains, comme la peine de mort, la torture, la liberté d’expression et les droits des personnes LGBTI. La communauté internationale ne peut continuer à observer la détérioration de la situation des droits humains en Gambie sans agir. »

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