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mardi 23 décembre 2014

Vote des Burkinabè de l’Etranger : Me Paul Kéré énumère trois défis majeurs à relever

Les Burkinabè de l’étranger participeront, selon les dispositions légales, à l’élection présidentielle de 2015. A quelques mois de l’échéance, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) met les petits plats dans les grands afin de réussir l’organisation. Comme une contribution au processus, cet écrit de Me Paul Kéré, avocat au Barreau de Nancy en France, énumère trois défis majeurs à relever au cours du scrutin. Lisez !


Vote des Burkinabè de l’Etranger : Me Paul Kéré énumère trois défis majeurs à relever
La Constitution de la IVème République Burkinabè du 2 juin 1991 énonce en son article 12 que « Tous les Burkinabè, sans distinction aucune ont le droit de participer à la gestion des affaires de l’Etat et de la société… »
L’alinéa 2 de cet article précise qu’« à ce titre, ils sont électeurs et éligibles dans les conditions prévues par la loi ».
C’est sans doute pour se conformer à ces dispositions constitutionnelles que le Vote des Burkinabè de l’Etranger a été institué par la Loi n°19-2009/AN du 7 mai 2009 portant révision du Code Electoral.
Aux termes du dernier alinéa de l’article 17 du Code Electoral « Hors du territoire national, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) prend les dispositions nécessaires pour l’organisation des scrutins référendaires et présidentiels dans les ambassades et consulats généraux ».
Le Code Electoral précise en son article 47 que : « le fichier électoral national est constitué de l’ensemble des listes électorales provinciales ainsi que de celles des Burkinabè résidant à l’étranger »
L’article 48 précise que « sont inscrits sur les listes électorales…. les Burkinabè résidant à l’étranger et régulièrement immatriculés à l’ambassade ou au consulat général dans le pays de leur résidence ».
L’article 52 énonce que « pour justifier son identité, l’électeur résidant à l’étranger doit être immatriculé à l’ambassade ou au consulat général et présenter la carte consulaire ».
L’article 59 précise que « peuvent être inscrits sur les listes électorales en dehors des périodes de révision, entre autres, les Burkinabè immatriculés à l’étranger lorsqu’ils reviennent, à titre provisoire, dans leur circonscription d’origine au moins quinze jours avant le scrutin ».
L’article 265 du même code indique que les dispositions relatives au vote des Burkinabè résidant à l’étranger n’entreront en vigueur que pour les scrutins à compter de 2015.
Le vote des Burkinabè résidant à l’étranger est donc désormais un droit civique consacré par le droit positif interne burkinabè aux termes de la loi n°19-2009/AN du 7 mai 2009 portant révision du Code Electoral.
Les critiques objectives sur le vote des burkinabè de la diaspora n’ont pas manqué de surgir.
Cependant, il conviendrait de relever le défi de cette première participation de la diaspora à l’élection présidentielle en dépit des multiples critiques qui sont les suivantes :
1. Comment organiser un scrutin crédible, transparent, en l’absence de chiffres fiables sur le nombre de Burkinabè et d’électeurs résidant à l’étranger ?
2. Est-il politiquement acceptable que le Président du Faso soit élu par un corps électoral dont la majorité des membres résiderait à l’étranger ?
3. Comment assurer l’intégrité, la surveillance du vote à l’étranger, dans les ambassades et les Consulats Généraux du Burkina Faso ?
3. S’il apparaît que le nombre d’électeurs de la diaspora est supérieur à celui des Burkinabè de l’intérieur, faut-il additer les voix de la diaspora ?
4. Doit-on exclure du droit de vote les Burkinabè résidant dans des pays de forte concentration de la diaspora mais où il n’existe pas de Consulat ou d’Ambassade du Burkina Faso ?
5. Est-il opportun d’ouvrir un bureau de vote dans les autres pays où de telles représentations diplomatiques existent mais où résident seulement quelques dizaines de Burkinabè ?
6. Faut-il fixer un seuil minimal d’électeurs pour l’ouverture d’un bureau de vote dans de tels pays et si oui, quel serait ce seuil ?
7. Comment la CENI va-t-elle, en pratique, procéder au recensement des électeurs Burkinabè résidant à l’étranger ?
8 - Comment garantir l’égalité des chances des candidats devant les électeurs résidant à l’étranger ?
9. Quel type de vote faut-t-il privilégier ? Le vote électronique et/ou le vote directe dans l’urne ?
10. Est-ce que les Burkinabè de la diaspora sont vraiment intéressés par une telle élection présidentielle au Burkina Faso ?
A ces dix interrogations, chaque Burkinabè de la diaspora où qu’il réside doit nécessairement et impérativement contribuer à la réussite de ce scrutin afin de relever le défi de la participation de la diaspora burkinabè à la vie politique de notre pays.
Pour ce faire, trois défis majeurs permettront à notre diaspora de relever assez facilement le challenge de cette première participation à l’élection présidentielle.
Tout d’abord, la nécessité d’une participation massive à un scrutin propre, loyal et transparent. Il est souhaitable que nos différentes diasporas fassent l’effort de participer massivement à cette élection présidentielle afin de montrer, en plus du poids économique de notre diaspora, son poids politique. La diaspora dans toute sa diversité à travers le monde doit faciliter et permettre l’organisation d’un scrutin propre, loyal et transparent. C’est de cette manière que nous pourrons démontrer aux yeux des pays d’accueil ainsi que de nos autorités politiques burkinabè que la diaspora burkinabè est digne de confiance et compte par application des dispositions de l’article 12 de la Constitution qui précise que « tous les Burkinabè sans distinction aucune ont le droit de participer à la gestion des affaires de l’Etat et de la Société ».
En second lieu, les Burkinabè de la diaspora doivent impérativement éviter les querelles « byzantines » et les batailles de « chiffonniers » afin de montrer non seulement aux pays de résidence que nous sommes dignes de confiance, mais aussi à nos autorités politiques que la diaspora burkinabè est respectueuse d’un certain pluralisme démocratique. Très souvent et notamment dans les démocraties occidentales où vivent certains Burkinabè, ce pluralisme démocratique est de rigueur et en vigueur : Prenons donc l’exemple de ces pays d’accueil. En effet, ce n’est pas parce qu’on ne partage pas la vision ou l’idéologie politique d’un compatriote que subitement celui-ci devient un ennemi politique : Adversaire politique oui, mais pas ennemi politique. L’adversité et le pluralisme démocratiques politiques n’est pas un problème de relation personnelle. Chaque membre de la diaspora burkinabè devra manifester librement son choix politique dans le secret de l’urne, en son âme et conscience, et ce, sans devoir rendre compte à quiconque. La diaspora burkinabè doit donc montrer un bel exemple en adoptant lors de ce scrutin un comportement digne et respectueux de la démocratie. Ce n’est qu’à ce prix que la diaspora burkinabè sera prise au sérieux.
Enfin, tertio, à travers cette première participation de notre diaspora à l’élection présidentielle, nous traduirons sincèrement dans les urnes, notre loyauté et notre patriotisme envers notre très cher pays. En Belgique le vote est obligatoire sous peine de sanction. La diaspora burkinabè a trop longtemps été privée de ce droit civique de vote qu’il serait satisfaisant de l’exercer effectivement maintenant en témoignant ainsi de notre attachement au Burkina Faso, même si nous n’y vivons pas continuellement.
Ce n’est qu’en relevant ces trois défis majeurs que nous contribuerons effectivement, d’une part au succès de l’élection présidentielle de 2015, et, d’autre part, par une réelle démonstration de notre patriotisme et de notre loyauté à notre pays. Il reste globalement un an à la diaspora pour s’organiser afin d’assurer la réussite de ce scrutin à enjeux « sui generis ».
Paul Kéré ; Avocat au barreau de Nancy (France) ; délégué CSBE

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