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mardi 30 septembre 2014

Situation nationale : le piège du «dialoguisme»

Le tête-à-tête entre la majorité politique et l’opposition.
Retour donc à Kosyam ce matin de la majorité et de l’opposition. Après des préliminaires séparés mardi dernier puis un face-à-face jeudi, les deux camps antagoniques de la classe politique burkinabè se retrouvent en effet ce lundi pour poursuivre le dialogue. Entre-temps, les deux coprésidents de ces pourparlers, Assimi Koanda et Zéphirin Diabré, auront mis à profit le week-end pour en définir les termes de référence, s’organiser et, qui sait, recevoir des instructions de leur chapelle respective.
Dans le principe, on ne peut que louer toute initiative de ce genre, qui plus est quand elle émane du premier des Burkinabè, du moment qu’elle vient rafraîchir le climat social, relativement surchauffé ces derniers mois. Voilà pour le principe. Pour le reste, ainsi que nous l’avions déjà affirmé dans notre édito du mardi 23 septembre 2014 (1), on est fondé à être sinon sceptique, du moins réservé sur l’issue heureuse de ces causeries présidentielles.
Il suffit, pour s’en convaincre, de se rappeler la posture d’Assimi et de Zeph jeudi à leur sortie d’audience : d’un côté un patron du CDP plutôt détendu, à défaut d’être enthousiaste ; de l’autre le chef de file de l’opposition politique qui tirait la tronche, arborant une mine d’enterrement, qui n’a pas desserré les dents et qui était particulièrement pressé de quitter les lieux comme s’il avait eu le diable aux trousses. Qu’est-ce qui a donc bien pu se passer à l’intérieur ?
Si l’on en croit les indiscrétions qui en sont sorties, l’ordre du jour portait notamment sur l’examen de la légalité de la révision constitutionnelle (et donc du référendum y relatif) ainsi que sur les modalités de mise en œuvre du Sénat. On ne sait pas si c’est la stratégie habituelle de négociation qui consiste à fixer la barre très haut pour ensuite donner l’impression de faire des concessions dans les marchandages, mais si c’est l’objet définitif de ces chassés croisés politiques, cela voudra dire que la décision du Grand Sachem est définitivement prise et qu’il ne se préoccupe guère plus que du modus operandi. On a bien peur dans ce cas que les présentes concertations ne débouchent sur une impasse. Comme déjà il y a quelque six mois à l’issue de la médiation interne entreprise par le président Jean-Baptiste Ouédraogo.
Car, depuis, les lignes n’ont pas vraiment bougé même si, à force de se jauger à travers marches et meetings, les deux camps, qui ne sont d’accord que sur leurs désaccords, sont certainement un peu épuisés et peut-être prêts maintenant à une paix des braves.
Ce qui est marrant dans cette affaire, c’est que Blaise Compaoré lui-même semble être dans le rôle qu’il affectionne tant, celui de médiateur-facilitateur, puisque jeudi, après avoir défini les objectifs qu’il visait, il s’est éclipsé, laissant les partis politiques se chamailler entre eux. Sans le fameux mandat exigé jadis par le CFOP avant toute discussion avec les seconds couteaux, à moins que la seule initiative du président du Faso en tienne lieu.
Tout se passe donc pour le moment comme si le premier magistrat burkinabè, lui, était au-dessus de la mêlée ; comme s’il n’était pas concerné par les problèmes posés, alors que c’est quand même de son avenir politique qu’il est question. Le danger pour l’opposition, qui risque de ne pas sortir indemne de ce traquenard, est de voir le piège de ce « dialoguisme » semi-direct avec le chef de l’Etat se refermer sur elle car si, comme on le craint, ledit dialogue échouait son initiateur pourrait en imputer la responsabilité à ses vis-à-vis, vu que lui au moins se serait fait le devoir de convoquer les pourparlers.
Mais si c’est juste pour discuter de la légalité du référendum et de son ruineux gadget sénatorial, l’homme providentiel de Ziniaré, qui connaît déjà la position de ses contempteurs, avait-il besoin de demander son avis à l’opposition, à moins que ce ne soit une façon bien habile de lui faire avaler la couleuvre sans risquer l’indigestion ?
La Rédaction

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