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jeudi 19 novembre 2015

Election présidentielle : Les enjeux du scrutin du 29 novembre

C’est à double scrutin auquel sont conviés les citoyens burkinabè le 29 novembre prochain : ils doivent élire le même jour, dans le même bureau de vote, le président du Faso et les 127 députés qui siègeront à l’Assemblée nationale. Ce premier rendez-vous post-Compaoré doit permettre de mettre fin à la Transition ouverte depuis octobre 2014, et ouvrir une nouvelle page de la vie politique du « Pays des hommes intègres ». Le monde entier nous regarde. L’échéance du 29 novembre comporte des enjeux qui dépassent le seul cadre burkinabè. Un peu comme le Bénin, qui avait été le laboratoire des processus démocratiques engagés au début des années 90 via la conférence nationale, le bon déroulement du scrutin du 29 novembre pourrait redonner du souffle dans le combat pour le renforcement de la vie démocratique sur notre continent.
Plus d’une semaine après l’ouverture officielle de la campagne présidentielle, tout semble bien se dérouler pour l’instant. Les acteurs politiques donnent le sentiment de vouloir respecter le code de bonne conduite qu’ils librement signé en août, même s’il faut regretter quelques dérapages en début de campagne. A Ziniaré par exemple, le jeune candidat Adama Kanazoé a publiquement sollicité le suffrage des ses parents afin que, dit-il, le pouvoir revienne dans l’Oubritenga. « Le combat que nous menons est celui d’Oubritenga. Avant, vous ne votiez pas un parti mais une personne qui est Blaise Compaoré. Vous savez pourquoi il a quitté le pouvoir, c’est à cause de ceux qui volaient à côté de lui. Quand ils se sont rassasiés ils l’ont ensuite chassé. Avant vous votiez pour le grand frère, et maintenant son petit frère est là, votez à 200 % », avait-il déclaré, avant de faire amende honorable face à la polémique que ses propos ont suscitée.
Avec l’ouverture le week-end dernier de la campagne pour les législatives, le niveau de veille citoyenne doit être élevé pour parer à toute action pyromane.
Les différents candidats se sont investis dans l’explication de leur programme de gouvernement, pris des engagements et promis un avenir meilleur aux Burkinabè. Sur le terrain, ils ont pu constater le discrédit qui frappe le discours politique et le scepticisme des populations face aux promesses de campagne. On se méfie de celui qui vous a au moins une fois trompés ! A eux de tenir un discours proche du réel, et éviter des promesses qu’ils savent intenables.
On regardera de près le taux de participation parce qu’il déterminera le niveau de légitimité du nouveau président. Les jeunes, qui ont été à l’avant-garde de la contestation contre la modification de l’article 37 de la constitution et du coup d’Etat du 16 septembre seront-ils les acteurs d’une « insurrection électorale » comme les y invitent des associations de la société civile ? Rien n’est moins sûr ! Beaucoup ne se sont pas inscrits sur les listes électorales et ne disposent pas des cartes électorales ; l’opération de recensement de rattrapage lancée par la CENI n’a pas drainé grand monde. Au final, sur une population de 17 millions d’habitants, le corps électoral n’en compte que 5,5 millions d’inscrits. Une faible participation nuirait quelque peu à la légitimité du nouvel exécutif.
L’enjeu de taille de cette élection, que les candidats à la présidentielle omettent cependant de rappeler aux électeurs, c’est le risque pour notre pays de déboucher sur une cohabitation, ce qui, vu le niveau de notre processus, entrainerait inévitablement une crise institutionnelle. Le couplage de la présidentielle et des législatives nous explose à ce risque. Si au soir du 29 novembre, le président élu n’a pas la majorité à l’assemblée nationale, cela signifie que le premier ministre sera désigné par le parti adverse ayant obtenu plus de sièges. Il formera son gouvernement et appliquera son programme, qui est différent de celui du président élu. On entrera dans une nouvelle crise qui obligerait le président à dissoudre la nouvelle assemblée et à provoquer de nouvelles élections législatives. Un luxe que le Burkina ne peut se permettre vu l’état de son économie.
Il faut donc souhaiter, qu’à défaut d’une majorité absolue à l’assemblée, le président qui sera élu ait une majorité confortable qui lui permettrait de nouer facilement des alliances pour former un gouvernement stable et cohérent

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