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mardi 13 janvier 2015

Nouvelle loi sur les universités publiques: création d’un conseil d’administration, la grande innovation

Le ministre de l'enseignement, Mary Teuw Niane.
Le 26 décembre dernier, l’Assemblée nationale a adopté la nouvelle loi sur les universités publiques du Sénégal. Elle apporte plusieurs innovations, dont la plus importante est la création d’un conseil d’administration.
Le projet de loi n°18/2014 relatif aux universités publiques du Sénégal adopté, le 26 décembre dernier, par l’Assemblée nationale, vise à apporter des innovations, notamment dans le management. Les nouveaux textes permettront d’harmoniser l’organisation et le fonctionnement des universités mais aussi promouvoir un partenariat entre l’université et l’entreprise.
Ce qui correspond aux orientations et nouvelles missions que le gouvernement entend donner à l’enseignement supérieur. Lequel a souffert, avait soutenu le ministre Mary Teuw Niane, dans l’exposé des motifs, devant les élus, de « l’absence d’un cadre législatif et réglementaire unifié ayant entraîné des disparités et des incohérences dans la gouvernance institutionnelle et académique du système universitaire ».
Une option justifiée pour la formation de ressources humaines de qualité et élargir la carte universitaire. Ce, d’autant plus que dans le monde d’aujourd’hui, par «l’économie du savoir », disposer de ressources humaines bien formées et hautement qualifiées constitue une « garantie pour un développement durable ».
Puisque nul n’ignore que l’éducation, en général, et l’enseignement supérieur, en particulier, sont des facteurs déterminants de croissance économique, de compétitivité sur le marché mondial, de revitalisation socio-économique et d’amélioration du niveau de vie des populations », a noté le Pr. Niane dans l’exposé des motifs du projet de loi.
Depuis quelques années, le Sénégal, qui n’arrive toujours pas à atteindre la norme indiquée d’étudiants (2 % de sa population), fait des efforts pour élargir sa carte universitaire.
Outre Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) et Gaston Berger (Ugb) de Saint-Louis, quatre nouvelles universités ont été créées et sont fonctionnelles. Il s'agit des universités de Thiès (Ut), Alioune Diop de Bambey (Uadb), Assane Seck de Ziguinchor (Uasz) et l'Université virtuelle du Sénégal (Uvs).
Absence d’un cadre législatif et réglementaire unifié
La construction de trois nouvelles universités est en cours de programmation. Il s’agit de celles du SineSaloum de Kaolack (Ussk), du Sénégal oriental de Tambacounda (Usot) et de la deuxième université de Dakar (Unidak) dont la pose de la première pierre est prévu le 19 de ce mois (sauf changement).
Par ailleurs, le Sénégal a mis en place l’Autorité nationale d’assurance qualité de l’enseignement supérieur. Elle est chargée d’évaluer la qualité des programmes d'enseignement et des activités de recherche. Toutefois, l’enseignement supérieur public se caractérise par l’absence d’un « cadre législatif et réglementaire unifié ».
Cela a entrainé, selon Mary Teuw Niane, des « disparités et des incohérences dans la gouvernance institutionnelle et académique du système universitaire ». La première conséquence, a-t-il fait remarquer, le ministère chargé de l’Enseignement supérieur, en raison de sa faible capacité technique de coordination du système, « a peu de contrôle sur les universités ».
Aussi, la nouvelle loi doit permettre, d’une part, « d’harmoniser l’organisation et le fonctionnement des universités par l’introduction d’innovations dans leur management et, d’autre part, de promouvoir un partenariat dynamique entre l’université et l’entreprise par une meilleure ouverture sur le monde du travail ».
La nouvelle loi comprend trois titres traitant respectivement du statut, des missions et principes d’organisation, du régime financier et des dispositions finales.
Statut, missions, régime financier
Concernant le statut, les universités restent des établissements d'enseignement supérieur public dotés de la personnalité juridique et de l’autonomie financière. Elles sont placées sous la tutelle du ministre chargé de l’Enseignement supérieur.(Art.1).
Leurs missions consistent à former les cadres supérieurs du Sénégal et des autres pays (formation initiale et formation continue, ainsi que la préparation des jeunes étudiants à l’insertion dans la vie active) ; de contribuer à la recherche scientifique au niveau national et international, pour le développement économique et social du pays ; de promouvoir la recherche scientifique et technologique pour une maîtrise des sciences, des techniques et du savoir-faire ; de développer les valeurs culturelles africaines ; de promouvoir la coopération internationale avec les universités étrangères. (Art.2).
L’université sénégalaise garde son caractère africain, voire mondial. « Les universités du Sénégal sont ouvertes à tous les étudiants justifiant des titres requis sans distinction de nationalité, de race, de sexe, ou de religion, dans la limite des places disponibles et suivant les procédures législatives et règlementaires en vigueur ». (Art.3).
Quant aux libertés et la sécurité indispensables à l’objectif de la formation et de la recherche, elles sont garanties, conformément à la loi relative aux franchises et libertés universitaires, aux membres du personnel d’enseignement et/ou de recherche ainsi qu’aux étudiants. (Art.4).
Alors que pour les grades et les diplômes, les universités les confèrent selon la réglementation en vigueur, sanctionnant les études et formations supérieures qu’elles dispensent elles mêmes et/ou en partenariat avec d’autres établissements nationaux ou étrangers. (Art.5).
Organisation
C’est dans l’organisation des universités qu’il y a un changement de taille. Car elles seront désormais dotées d’un conseil d’administration (une innovation). Ce qui, jusque-là, n’était pas le cas. L’université comptera également trois organes que sont : un conseil d’administration, un conseil académique et un recteur.
Les universités sont organisées en Facultés, en Unités de formation et de recherche (Ufr), en Ecoles et en Instituts qui sont créés par décret en fonction des besoins et des capacités internes et externes de chaque université. (Art.6).
Le conseil d'administration, organe délibérant de l’université
Constituant l’une des grandes innovations introduites par les nouveaux textes, le conseil d’administration de l’université est au cœur du dispositif organisationnel. L’article 7 des textes stipule, en effet, que le conseil d’administration est « l’organe délibérant de l’université ».
Il veille donc « au respect de la mission de l'université », est « l’instance de validation de ses orientations stratégiques, pédagogiques et scientifiques » et est chargé de « l’évaluation et du contrôle de la gestion administrative et financière ». Il est ainsi chargé d’examiner et d’adopter le plan stratégique de développement de l’université ; les prévisions budgétaires, le budget annuel, le plan d’investissement, les états financiers et le rapport annuel de l’université ; les règles de gouvernance de l’université ; l’organigramme de l’université ; le code d’éthique et de déontologie applicable aux membres du personnel de l’université.
Il en est de même des propositions de nomination des vice-recteurs, des doyens de Facultés, des directeurs d’Unité de formation et de recherche, des Ecoles et Instituts ; de la création ou la suppression des filières et des structures ; des mesures d’évaluation de l’efficacité, de l’efficience et de la performance des universités.
Mais également de l’acceptation des dons et legs en faveur de l’université, ainsi que leur utilisation ; des affaires contentieuses qui engagent l'université ; du recrutement des personnels de l'université ; du règlement intérieur de l'université et de toute question qui lui est soumise par le ministre charge de l’Enseignement supérieur ou par le recteur. Il reçoit aussi les rapports, informations et procès-verbaux des autres organes de l'université.
Un conseil de 20 membres
Le conseil d’administration est composé de 20 membres. Il s’agit du recteur de l’université, de trois membres élus par et parmi les Professeurs, Directeurs de recherche, Maîtres de conférence et Maîtres de recherche ; deux élus par et parmi les Maîtres assistants, Chargés de recherche et Assistants ; deux élus par et parmi les étudiants ; deux élus par et parmi les personnels administratif, technique et de service et de dix issus du milieu socioéconomique. (Art.8).
Le président et le vice-président du conseil d’administration sont nommés par décret parmi les membres issus du milieu socioéconomique, sur proposition du ministre chargé de l'Enseignement supérieur. Le vice-président assure l’intérim du président du conseil en cas d’empêchement. Le secrétaire général de l’université assure le secrétariat des réunions du conseil d’administration, « sans voix délibérative ». Quant aux membres issus du milieu socioéconomique, ils sont nommés par décret sur proposition du ministre chargé de l’Enseignement supérieur. (Art. 9).
Les membres du conseil d’administration ont l’obligation de prendre les décisions « dans l’intérêt de l’établissement et dans le respect des règles éthiques et déontologiques ». (Art. 10).
Les membres du conseil d’administration, autres que le recteur et les étudiants, sont désignés pour un mandat de trois ans renouvelable une fois (Art. 11), tandis que le mandant des étudiants est d'un an renouvelable une fois.
A noter que le conseil d’administration se réunit au moins deux fois par an en session ordinaire et autant que de besoin en session extraordinaire, sur convocation de son président. (Art. 12).
Le conseil d’administration établit, en rapport avec le recteur, les objectifs à atteindre et détermine les modalités d’évaluation de la performance de l’université. (Art. 13).
A cet égard, il statue sur l’efficacité et l’efficience de la gestion des ressources humaines, matérielles et financières dont dispose l’université. A cette fin, il institue en son sein un comité d’audit, un comité des ressources humaines et un comité d’éthique et de déontologie. L’organisation et le fonctionnement desdits comités sont précisés par le règlement intérieur de l’université.
Outre le conseil d’administration, l’université est dotée d’un conseil académique qui est l’organe de délibération de toutes les questions d’ordre académique (suivi et évaluation des aspects scientifique, académique, pédagogique, disciplinaire et de recherche). (Art. 14). Il est dirigé par le recteur.
Le conseil académique est ainsi chargé d'approuver les programmes et le contenu des enseignements ; de décider aux fins de recrutement, de l’équivalence des grades, diplômes et certificats ; de proposer les mesures et les listes d’aptitude pour la promotion des enseignants-chercheurs ; d'établir le calendrier universitaire ; de préciser les critères et les mécanismes d’auto-évaluation des Unités de formation et de recherche, des Facultés, des Ecoles et Instituts ; de proposer les mesures de nature à améliorer la qualité de l’enseignement et de la recherche, ainsi qu’à développer la formation continue, et de proposer la création ou la suppression des filières et des structures.
Le conseil académique délibère sur le « régime des études et des examens », participe à « l’élaboration du plan stratégique » de développement de l’université et aux « opérations d’évaluation de l’établissement ».
Les modalités de son organisation et de son fonctionnement sont fixées par décret. Présidé par le recteur, il comprend, en outre, un représentant du ministre chargé de l’Enseignement supérieur ; un du ministre chargé de la Fonction publique ; le secrétaire général de l'université ; les doyens des Facultés, les directeurs d’Unités de formation et de recherche, des Ecoles et Instituts ; cinq membres élus par et parmi les Professeurs, Directeurs de recherche, Maîtres de conférence et Maîtres de recherche ; trois élus par et parmi les Maîtres assistants, Chargés de recherche et Assistants ; deux représentants des étudiants de l’université ; un représentant des syndicats du personnel administratif, technique et de service ; un représentant des syndicats des enseignants chercheurs et le directeur du Centre des œuvres universitaires. (Art. 15).
Daouda Mané

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