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lundi 29 décembre 2014

Vous avez bien dit « lutte contre la gabegie » ?

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altLes derniers scandales à répétition sur le détournement de l’argent public, a fait sortir de ses gongs le président de la République qui serait tombé des nues à l’annonce des sommes détournées !
Plus de 300 milliards d’ouguiyas ! L’équivalent de plus de la moitié du budget annuel de la Mauritanie qui a disparu entre les mains de quelques diplomates et de quelques fonctionnaires véreux ! Une telle situation, le président de la République a dit ne pas la tolérer, c’est pourquoi, il vient d’exiger la restitution des fonds, et cela avant même que la justice ne se prononce pas sur le sujet. Dans la foulée, le chef de l’Etat a réaffirmé la volonté des Autorités, de poursuivre, voire de renforcer, la lutte contre la gabegie et le détournement des biens publics. Il s’agit de demander aux personnes qui ont accumulé des richesses de dire la provenance de ces richesses et de les justifier...Vœux pieux… quand on sait que le détournement des biens publics est le sport le mieux partagé de nos gestionnaires, que les écarts de gestion sont légion dans l’administration des finances, que les milliardaires se comptent par centaines dans l’administration publique… Vœu pieux surtout quand on constate que six ans après l’entame de cette opération dite « mains propres », des fautes de gestion ont été certes repérées, et puis Vlan puis silence ! Aujourd’hui, pas un fonctionnaire, auteur d’actes de gestion répréhensible, n’est interpellé. Ils ne manquent pourtant pas, ces hommes et femmes qui ont confondu les biens du peuple à leurs biens personnels usant et abusant de la confiance de ce peuple pour faire fortune. Malheureusement, la Mauritanie reste un véritable champ ouvert de toutes les formes possibles et imaginales ou inimaginables de mauvaise acquisition des "biens". A de très rares exceptions près, toutes les grandes figures riches du pays ont un passé dans l’administration publique de diplomates, haut gradé des forces armées, gestionnaires, de directeurs, de comptables, de ministres. Le milieu des affaires n’est lui aussi pas du reste. Il a largement profité de l’administration publique pour se constituer.  Normal diront les plus incrédules qui font remarquer que dans un pays où tout provient de l’Etat, il est normal que celui-ci soit gangréné par des malversations. C’est ainsi qu’il a été constaté qu’ils sont nombreux ces hommes d’affaires mauritaniens qui ont bâti leurs fortunes sur des pratiques louches faites de passe-droits, de favoritisme et de mauvais procédés dans le traitement des droits fiscaux de la collectivité.  Et comme nous sommes dans un pays où seuls les « grandes familles » se partagent le pactole, ce sont en général ces familles qui profitent de la situation. Ainsi, la manne financière de la Mauritanie est surtout connue pour servir les fils du pays qui sont bien nés au grand dam de la masse laissée pour compte. L’aristocratie d’aujourd’hui, est née dans les officines obscures de la mauvaise gestion qu’elle a adoptée pour la banaliser. Cette classe sociale est le pur produit du détournement des deniers publics, de la gabegie et de la corruption. Ayant accumulé les richesses par les seules voies en vigueur qui sont les voies détournées, elle est la sève du vice économique bâti sur la fraude, le mensonge, le faux et le trafic de l’illicite. Cela, tous les mauritaniens le savent.  Combien d’hommes, jadis misérables, ont trimé dans la misère avant d’être désignés à des postes de responsabilité financière pour ensuite s’imposer dans les hautes sphères du fait de l’argent qu’ils ont détourné durant la magistère ? Combien sont-ils ces arrivistes qui ont atterri dans une fonction, pour acquérir aujourd’hui une soi-disant renommée ? Combien de va-nu-pieds ont été rendus respectables, craints et influents dans la société par l’argent obtenu facilement ? Combien de petits fonctionnaires, sans formation, ni niveau, brassent des millions et des millions pour avoir tout simplement eu accès à la « fonction » et pour avoir géré les fonds d’une « boîte » ? Combien de belles maisons, de voitures luxueuses, de « caves » et de comptes garnis d’argent liquide détiennent les nouveaux nantis dans notre pays ? Combien sont-ils ces gens que l’on connait démunis, cravant la dalle, aujourd’hui nouveaux propriétaires fonciers, détenteurs de licences de banques, de pêche, de recherche ou d’exploitation minière, qui ont subitement quitté la misère pour se retrouver dans l’opulence, sans avoir de comptes à rendre à personne ?  Combien de fils à papa, nés avec une cuillère en or dans la bouche, sont placés aujourd’hui à la tête de fortunes colossales tirées des biens publics ? Combien de « grandes familles » continuent de profiter abusivement des largesses de l’administration publique au vu et au su du « Censeur » ? Bref, combien de personnes sont subitement devenues riches et enviées sans avoir fourni le moindre effort pour gagner, honnêtement, leur fortune ?  En Mauritanie, le circuit économique est très faible. L’économie traditionnelle n’a pas connu de mutation véritable. Ce qu’il y a, c’est l’économie du captage, grâce à laquelle main basse est faite sur les fonds publics par des voies alambiquées. Ici, le marché est presqu’inexistant et un tissu industriel digne du nom, n’arrive pas à voir le jour. L’économie de blanchiment tue le progrès économique et réduit l’activité productive à une simple expression d’économie de service. Et quel service d’ailleurs ? La corruption gangrène les mœurs, les passe-droits et le clientélisme, aussi. L’étroitesse du marché réduit les chances d’un épanouissement généralisé des acteurs. L’Etat est le principal pourvoyeur et distributeur des richesses. Tout gravite autour de lui. Du petit marché d’une PME aux milliards des multinationales. Ceux qui sont au sommet régulent, orientent, créent des réseaux et des filières de « captage » des ressources. D’où le fait que le cercle des riches se limite en un seul groupe et souvent en une ou, tout au plus, en une vingtaine de familles qui contrôlent tout, les mannes de l’Etat y compris.  Une chose est sure : les déclarations d’intentions dans la lutte contre la gabegie ne signifient absolument pas rien, et relèvent uniquement de la politique politicienne si ce n’est du folklore politique. Tant que la Mauritanie ne soldera pas son lourd passif accumulé dans la mauvaise gestion, la corruption et le détournement des deniers publics par une action forte et généralisée en vue de restituer à l’Etat toutes les fortunes volées, elle continuera à patauger dans la boue. Amar Ould Béjà  (L'Authentique)

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