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lundi 1 décembre 2014

SACCAGES DU PALAIS DE JUSTICE DE BOBO LE 30 OCTOBRE : MOUSSA ZERBO RACONTE

Moussa Zerbo

Moussa Zerbo est le  correspondant provincial du Houet, le Secrétaire national et porte-parole, le premier adjoint et le secrétaire chargé des questions électorales  de l’Union pour le progrès et le Changement (UPC). Dans cette interview accordée en marge de la session du secrétariat exécutif du parti le samedi dernier, il explique comment Bobo-Dioulasso a vécu les journées des 30 et 31 octobre 2014. Il apporte aussi son témoignage sur certains évènements auxquels il a assistés, notamment les saccages du Palais de Justice de Bobo.
Pouvez-vous revenir sur le film des événements  intervenus à Bobo les 30 et 31 octobre 2014 ?
Moussa ZERBO (M.Z) : Il faut dire que tout comme à Ouaga, à Bobo aussi on a eu droit au même mouvement  et peut-être même que Bobo est allé plus loin, n’eût été qu’à Ouaga il y a eu l’assaut de l’Assemblée Nationale.
 A Bobo également les militants sont sortis de même que la population qui est sortie nombreuse pour marquer sa désapprobation de ses projets que nous trouvions injustes et qui allait mettre le pays en péril.
A Bobo, on a connu beaucoup de dégâts et beaucoup de blessés. Mais qu’à cela ne tienne,  Bobo aussi n’est pas resté en marge, il s’est battu. Et on ne peut qu’être satisfait à l’issue des événements qui ont eu lieu.
Bobo s’est battu comme vous le dites. Est-ce que vous pouvez expliquer concrètement ce qui s’est passé sur le terrain ?
M.Z: Concrètement, il faut dire que les gens sont sortis. Ils ont marché et en plus de ces marches, il faut dire qu’il y a des édifices publics qui ont été attaqués par les manifestants notamment la mairie centrale de Bobo, le palais de justice, les banques et pratiquement tous les domiciles des maires qui étaient en poste.
Y a-t-il eu affrontement entre les forces de l’ordre et les manifestants ?
M.Z: Pas du tout, c’est la seule journée du 29 octobre où nos camarades qui étaient en train de faire le tour de la ville pour donner l’information aux gens de sortir pour la manifestation du 30 qui ont été arrêtés et gardés à la gendarmerie où je me suis personnellement rendu. Et j’y suis resté jusqu’à la nuit et on a passé pratiquement toute la nuit là-bas.
Cela ne faisait que révolter. Ce qui a aggravé la situation de Bobo c’était justement cette rétention. Vous n’ignorez pas que c’était la plupart des leaders des OSC, notamment le balai citoyen, le mouvement rouge, la ligue des jeunes, le mouvement « y’en a marre », le mouvement « ça suffit ».
Tous ceux qui étaient responsables étaient à bord d’un véhicule annonceur qui faisait le tour de la ville avec les partis politiques pour informer les gens  de sortir pour la marche du 30. Malheureusement vers 16h, ils ont été interceptés par la gendarmerie et conduits au camp de Kuinima et c’est de là-bas que l’information a été passée.
 Nous  qui sommes allés à l’intérieur, nous n’avons pas été retenus. Je suis parti avec le responsable d’un parti et le bruit a couru que nous les responsables avons été également arrêtés. Ce qui a encore exacerbé la population.
Du coup le lendemain matin, je suis allé à 8h où j’ai pu négocier avec les forces de l’ordre qui m’ont remis les éléments et le véhicule annonceur qui tournait.
Donc ils ont tous été relâchés le matin et c’était trop tard. La nuit il y a eu beaucoup d’information surtout sur les réseaux sociaux et le 30, comme il fallait s’y attendre,  les gens étaient sur les nerfs, ce qui a amené cette situation là.
A Ouaga,  il y a eu des blessés et des morts. Quelle a été la situation à Bobo ?
M.Z : A Bobo, nous avons enregistré 17 cas de blessés aussi bien par balles que par brûlures. Nous nous sommes également rendus à la morgue le 30 octobre même dans la soirée. A part les cas de blessés que nous avons eus, nous n’avons pas eu à déplorer des pertes en vie humaine en temps que tel.
Il y a eu deux morts mais c’est après les manifestations parce que ce sont des règlements de compte entre des personnes.
Ce sont un jeune homme du secteur 14 de Bobo et un autre du secteur 21. Le premier est entré dans le cadre des saccages de domiciles et il s’est trouvé pris par le feu à l’intérieur de la maison. Il n’a pas été brûlé mais plutôt asphyxié.
En fait, c’est carrément après les manifestations qu’il est allé pour ça. Pour ce qui est des blessés au niveau de l’hôpital, nous nous sommes organisés, nous leur avons rendu visite régulièrement. Jusqu’à la dernière date, il restait cinq blessés au niveau de l’hôpital Sanou Sourou de Bobo qui ont regagné leur domicile même si certains sont toujours retenus parce que c’était des brûlures assez graves.
On apprend que le frère de l’ancienne première dame a été arrêté à la suite de ces manifestations. Est-ce que vous avez des informations sur son sort ?
M.Z : Sur son sort c’est trop dire. Sinon j’ai été témoin de son arrestation lorsqu’il tirait à balles réelles.
Moi-même j’ai failli prendre une balle là-bas parce que je me suis rendu sur le terrain à la demande de la police nationale. Il tirait de l’intérieur de sa maison avec un fusil et les manifestants étaient devant la porte et ne voulaient pas quitter.
Il tirait dans le public, les uns recevaient les balles dans les bras, d’autres ont reçu à la mâchoire mais cela n’a pas du tout découragé les manifestants qui sont restés sur leur pied de guerre et c’est la gendarmerie qui est venue le faire sortir. Les manifestants voulaient en découdre avec lui mais la gendarmerie a réussi à l’exfiltrer.
Ce qui a causé une certaine révolte. Les manifestants se sont rendus à la gendarmerie et elle leur a fait entendre que l’affaire devait suivre son cours et que la justice s’en chargeait.
 C’est de là qu’est venu le saccage du palais de justice. Ils sont allés au palais de la justice pour réclamer le frère de l’ancienne première dame et comme il ne s’y trouvait pas, ils se sont dit alors que si on cherche à cacher le monsieur, ils brûlent le palais de justice avec celui-ci à l’intérieur. Le gouvernorat, la RTB ont échappé de très peu, sinon tous ces édifices auraient connu le même sort que la mairie centrale de Bobo ou le palais de justice.
Propos recueillis par Abdou ZOURE et retranscrits par Issouf NASSA (Stagiaire)

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