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mercredi 26 novembre 2014

Suspense pour la succession d'Abdou Diouf au sommet de la Francophonie à Dakar

Qui pour succéder à Abdou Diouf à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie ? Les chefs d'Etat doivent trancher ce week-end à Dakar entre cinq candidats lors d’un sommet dominé en coulisses par Ebola et le Burkina Faso.
"Il n'y a pas de candidat qui s'impose pour succéder à cette personnalité exceptionnelle", résume un responsable gouvernemental français sous couvert d'anonymat. "L'après-Diouf est une vraie page blanche. Tout peut arriver, y compris une candidature de dernière minute", renchérit une source proche de l'OIF, qui compte 57 Etats membres et 20 pays observateurs pour 274 millions de locuteurs à travers le monde.
Sous la férule pendant douze ans de l'ex-président sénégalais, l'OIF, jusqu'alors connue pour ses missions de coopération dans le développement et de soutien à la langue française, a gagné en poids politique, grâce à la diplomatie d'influence pratiquée dans les crises africaines par M. Diouf auprès de ses anciens pairs.
Ses réseaux tissés avec les instances internationales, de la Banque mondiale à l'ONU, ont aussi fait du secrétaire général un incontournable relais entre les pays du Nord et du Sud.
Mais l'OIF, lancée en 1970 avec l'ambition d'être un "Commonwealth à la française", doit continuer à prouver sa valeur ajoutée, à l'heure où la crise économique dans les pays du Nord pousse les gouvernements à restreindre leurs financements. Le budget annuel de l'OIF (84 millions d'euros) patine et la France, premier bailleur devant le Canada et la Belgique, a diminué de 20% son financement cette année.
- Pas de favori -
De l'avis général, aucun candidat au secrétariat général ne dispose du carnet d'adresses ni du charisme d'Abdou Diouf pour donner du poids à l'OIF.
La Canadienne d'origine haïtienne Michaelle Jean, 57 ans, ex-gouverneure générale, semble toutefois avoir une longueur d'avance sur ses concurrents, grâce à une active campagne pour une stratégie économique de la francophonie, en particulier en Afrique où vivront 85% des 700 millions de francophones d'ici 2050.
Mais certains rejettent sa candidature. "Un secrétaire général non africain pourrait être perçu comme une défaite diplomatique africaine", souligne un diplomate du continent.
Une règle non écrite veut que le secrétaire général soit issu d'un pays du Sud - certains estiment même qu'il doit rester une chasse gardée africaine - et que l'administrateur (actuellement le Québécois Clément Duhaime) vienne du Nord.
Du coup, certains militent pour l'ancien président burundais Pierre Buyoya (1987-1993, 1996-2003), seul ex-chef d'Etat en lice, en dépit de son passé d'ancien putschiste.
En lice aussi l'ex-Premier ministre mauricien, Jean-Claude De Lestrac, secrétaire général de la Commission de l'Océan indien, l'écrivain et actuel ambassadeur du Congo à Paris Henri Lopes, et l'Equato-Guinéen Agustin Nze Nfumu.
Ils seront départagés au terme de discussions à huis clos, sans vote. Parmi les éventuelles surprises de dernière minute, le nom de Jack Lang, ancien ministre français de la Culture aujourd'hui à la tête de l'Institut du monde arabe à Paris., a circulé dans certains médias.
- Les jeunes, 'bombe à retardement' -
A l'affiche du 15e sommet, les femmes et les jeunes seront au menu des débats. "La jeunesse est un dossier chaud en Afrique, comme l'a montré la situation au Burkina Faso: les jeunes urbanisés sans emploi sont une bombe à retardement", souligne une source proche de l'OIF, basée à Paris.
En coulisses, le changement de régime à Ouagadougou sera de toutes les discussions.
En poste depuis 1987, Blaise Compaoré a été contraint de quitter le pouvoir fin octobre sous la pression de la rue et de l'armée après avoir annoncé un projet de révision constitutionnelle destiné à lui permettre de briguer un nouveau mandat. Cet épisode inédit a laissé songeur plus d'un chef d'Etat africain.
La communauté internationale, qui avait menacé le pays de sanctions si le président intérimaire était un militaire, s'interroge sur la marge de manoeuvre de l'ex-diplomate nommé à sa tête, Michel Kafando, face au lieutenant-colonel Isaac Zida, qui reste l'homme fort du pays.
Le sommet abordera aussi l'épidémie d'Ebola qui touche deux pays francophones, la Guinée et le Mali.
A Dakar, des opposants au sommet font déjà entendre leurs voix. "L'OIF est une organisation qui ne sert qu'à asseoir la diplomatie française au niveau international et n'est pas acceptable", a ainsi dénoncé Malick Noël Seck, coordinateur du collectif "Front contre la Francophonie".

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