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lundi 1 septembre 2014

CITE SOLIDARITE : Les pensionnaires retournent...

Après les emprises du carrefour Donka et les alentours de la mosquée Fayçal, le ministère de l’action sociale, de la promotion féminine et de l’enfance jette son dévolu sur la Cité de solidarité de Taouyah. Invoquant des travaux devant in fine transformer la cité en un centre d’apprentissage de métiers pour personnes handicapées, mais aussi la nécessité de mettre un terme à la promiscuité lugubre dans laquelle ces personnes y étaient entassées, les responsables de la direction nationale de l’action sociale ont procédé ce dimanche, au départ effectif des véhicules conduisant quelques 364 pensionnaires vers leurs lieux d’origine. Pour les maintenir sur place, le Fonds de développement social et de la solidarité (FDSS) devrait prendre le relais, à travers le financement de projets d’activités génératrices de revenus.
Deux catégories de personnes handicapées
En ce dimanche matin, c’est une atmosphère de misère qui régnait dans l’enceinte de la Cité Solidarité de Taouyah, dans la commune de Ratoma. A l’occasion du départ effectif des bus devant transporter certains d’entre eux dans leurs milieux d’origine, les pensionnaires, la plupart habillés en haillons et bagages à même le sol, entre les flaques d’eau boueuse, avaient pris d’assaut l’espace dégagé de la cité. Il y avait deux catégories. La première était composée de ceux qui, ayant été retenus pour ce retour, ne cachaient point leur enthousiasme à l’idée de percevoir les montants qu’on leur a fait miroiter. Un montant dont ils ignoraient encore la valeur réelle, mais que Mariama Sylla, en partance pour Boffa estimait à entre 15 et 25 millions de GNF! L’autre catégorie comprenait ceux qui, pour une raison  ou une autre, n’auront pas été retenus et dont beaucoup accusent les responsables du ministère de l’action sociale d’avoir procédé à une sélection arbitraire.
Les plaintes de M. Conté
M. Conté est de ce second groupe. Plutôt âgée et se présentant comme la maman de deux enfants aveugles, elle se plaint qu’aucune de ses deux progénitures n’ait été retenue pour le retour à Maférinyah. Alors que, dit-elle, « nous avons passé 10 mois dans l’enceinte de cette cité ». Interpellé par nos soins, M. Touré du ministère rétorque qu’elle ne dit pas vrai. Selon lui, cette dame fait partie des personnes handicapées qui n’étaient pas pensionnaires de la Cité, mais qui veulent tout de même bénéficier des mesures d’accompagnement qui sont prévues pour les candidats au retour. Autrement, poursuit-il, « nous avons procédé à six recensements et nous avons pris tous ceux qui figuraient dans au moins trois de ces recensementsSi comme elle le prétend, elle était effectivement de la cité, ces enfants auraient été recensés. »
Certains bénéficiaires reviendront
Maladho Barry, elle, est du premier groupe. Elle est arrivée à Conakry quand, en décembre dernier, on a évoqué l’idée de remettre 10 millions de GNF à ceux qui squattaient les alentours de la mosquée Fayçal. Mais la chance ne lui avait souri. Depuis, elle s’est rabattue sur la Cité Solidarité pour attendre "son tour". Elle reconnait s’être durement battue pour faire partie enfin du groupe des bénéficiaires. Bien que ne sachant pas aussi combien lui est destiné, elle s’engage tout de même à ne pas revenir à Conakry. Ce qui n’est pas le cas d’A. Bangoura, une jolie demoiselle ayant perdu l’usage de ses jambes. Sa particularité, c’est qu’elle n’est pas nécessairement pensionnaire de la Cité Solidarité. Bénéficiant de la complicité de certains amis qui y habitaient, elle aura tout de même réussi à disposer du badge-sésame. Elle assure que dès ce lundi, elle reviendrait à Conakry pour continuer son métier de coiffeuse.
Incertitudes autour des activités génératrices de revenu
Mohamed Diaby, directeur national adjoint de l’action sociale nous confie qu’avant la phase ultime de ce retour effectif, « le ministère a déployé sur le terrain des équipes qui ont déjà pris contact avec les autorités à la base (gouverneurs, préfets, sous-préfets, chefs de quartiers, etc.) et avec les parents des "revenants". Une campagne de sensibilisation visant à faciliter leur réintégration dans leur milieu social d’origine a été également menée ». Mais en ce qui concerne le volet des activités génératrices de revenu pour aider à leur maintien sur place, il devrait, à en croire M. Diaby, être piloté par le Fonds de développement social et de la solidarité (FDSS). Contacté pour les besoins de recoupement, le directeur général de cette institution, Safrin Condé, ne confirme cette information qu’à moitié. Certes, il admet qu’il y a en vue un programme d’intégration socioéconomique à destination des couches vulnérables, mais ledit programme ne serait pas nécessairement en rapport avec l’opération du retour des personnes handicapées, et ces dernières n’en seraient pas exclusivement les cibles. Selon lui, l’opération de retour ainsi menée serait surtout dictée par la nécessité de mettre fin à la promiscuité dans laquelle les pensionnaires étaient entassés, ces derniers temps, dans l’enceinte de la cité. Une promiscuité qui, ajoute-t-il « était un facteur d’énormes risques sanitaires pas les temps qui courent ».
Les handicapés guinéens, insatiables
Associée à l’opération, la Fédération guinéenne des associations des personnes handicapées (FEGUIPAH) estime qu’il s’agit d’une « mesure salutaire ». D’autant plus salutaire qu’un des membres de la fédération nous a confié que, « après le départ des personnes handicapées, la cité qui est déjà en chantier va être transformée en un centre d’apprentissage de métiers pour personnes handicapées ». Mais en attendant, la question est celle de savoir si les personnes qui retournent dans leurs localités d’origine  y resteront  effectivement ? François Dopavogui, président de la FEGUIPAH répond que ce n’est pas là l’objectif prioritaire de l’opération. Ce qui compte davantage à ses yeux, c’est le fait que la Cité soit débarrassée de « ses occupants qui y menaient une vie indigne des êtres humains ».
Pour le reste, il pense qu’on ne saurait empêcher ceux qui voudront revenir réoccuper les trottoirs de le faire. Parce qu’à l’en croire, « certains handicapés guinéens sont insatiables et n’ont aucune dignité ». Chapeautant toute l’opération, le directeur national de l’action sociale, Moussa Traoré, en estime le budget à 1 milliard 200 millions de GNF qui, dit-il « prend en compte l’identification, le recensement, l’assainissement du centre, les perdiems des guides, les mesures d’accompagnement des revenants, les perdiems des missions de sensibilisation et de prise de contact déjà sur le terrain, etc.). De ce montant, chaque candidat au retour devrait, selon des informations que nous avons obtenues sur place, recevoir 2.500.000 GNF, une fois arrivé à destination.  Autant dire que pour beaucoup, le risque de désenchantement est des plus élevés.  
Boubacar Sanso BARRY pour GuineeConakry.info  

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