Passation de service entre Aminata Touré et Mahammed Dionne, nouveau Premier ministre du Sénéga
Tous les analystes politiques l’ont dit : dans le régime présidentiel typiquement sénégalais, un Premier ministre ne peut que dérouler la vision définie, avec plus ou moins de succès à l’épreuve du réel et du vécu quotidien. Et partira tôt ou tard lorsque « le maître du jeu » aura un autre agenda à dérouler. Dès lors, Abdoul Mbaye n’a pas démérité. Mme Aminata Touré non plus. Tout est dans l’opportunité du départ qui tient plus du communicationnel sur cet agenda que de relations heurtées ou conflictuelles, qu’aucun président de la République ne laisserait prospérer alors que la longévité au poste ne dépend que de son bon vouloir.
Efficience et efficacité. M. Abdoul Mbaye l’avait si bien compris qu’il avait adossé son séjour au 9ème étage du building sur les critères d’efficacité et d’efficience, notions forcément corrélées au temps imparti. Mme Aminata Touré s’est concentrée sur la cadence, autre notion du temps à accélérer, tant la demande est multiforme et pressante. Au finish, on sait que pour tous les deux, les carottes étaient cuites assez tôt, dès lors que l’effectivité des mesures, surtout sociales, fait encore défaut sur plusieurs tableaux. Car si Abdoul Mbaye, le technocrate, a été victime de la bataille sur l’efficience économique du banquier ; son successeur, plus politique, n’a-t-elle pas manqué de vigilance relativement à la promesse transversale pour « une gouvernance sobre et vertueuse » ? Quels que puissent être par ailleurs ceux qui ont été épinglés lors de ces locales pour des accusations de tentative d’achat de conscience et de démonstrations ostentatoires, ils ont précipité les sanctions (encore douces) de l’électorat, légitimant toute mesure prise contre les uns ou les autres. Qui plus est, le président avait fustigé l’incompétence (comprenez le manque d’efficience et d’efficacité de certains ministres) depuis Kédougou et non pas la France où il est allé en février défendre « son » plan dont Mimi aura beau tenté d’accélérer la cadence, surtout dans l’agriculture censée porter les promesses d’emplois massifs.
Impact de l’action gouvernementale. La grande leçon à tirer tient en fait au changement des comportements et des mentalités préconisé et qui doit s’opérer d’abord au niveau le plus élevé de l’Etat. Car l’efficacité et l’efficience ne sauraient être l’apanage de M. Abdoul Mbaye. Tout PM, tout ministre, tout fonctionnaire devrait en faire son leitmotiv, à tout moment. Mais en toile de fond, chacun doit savoir que la réussite de sa mission se mesure à l’effectivité des actions annoncées. Mimi Touré a communiqué directement en produisant son fascicule : «Il l’avait promis, il l’a fait !». C’est bien dit. Mais c’est une arme à double tranchant. Car, qu’en est-il de ce qu’il avait promis et qu’il n’a pas (encore) fait ? A l’épreuve du réel, les promesses d’emplois sont un vrai serpent de mer. La relance de l’agriculture ne pouvant se réaliser dans les conditions actuelles. Mimi n’aura pu accélérer la cadence face à la faible productivité des sols, alors que depuis cinquante ans le Snégal importe encore de l’engrais (en quantité insuffisantes) et que les semences écrémées (de qualité médiocre quoiqu’on en dise) ne sont même pas disponibles à temps et partout. Quant au redéploiement industriel, il n’est pas pour demain. Car quoique louable, la réhabilitation de la NSTS n’est qu’un bon début, avec moins de 500 emplois à la clé. A ce rythme, la lutte contre le chômage massif restera utopique, surtout lorsqu’on assiste plutôt à des destructions d’emplois. Et qu’il en sera ainsi, tant qu’on n’aura pas capacité adéquatement le secteur privé, seul capable de prendre en charge le développement minier et industriel, et dont le rôle doit être central sur l’ensemble des problématiques susmentionnées, y compris une agriculture moderne, irriguée, intensive…
Fara SAMB

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